Ces PMI à la base du savoir-faire nippon
Littéralement « usines de quartier », les machikoba jouent un rôle majeur dans l’économie, avec une capacité d’innovation hors du commun.
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À Tokyo, certains quartiers ont conservé une intense activité de production à proximité du centre de la capitale, dans cette partie que l’on a baptisée « Shitamachi », c’est-à-dire « la ville basse », située à l’est du palais impérial, où vivait le petit peuple. C’est le cas notamment de l’arrondissement d’Ota. Au milieu des petites rues bordées de maisons individuelles, on trouve des bâtiments de un ou deux étages qui ressemblent davantage à des entrepôts qu’à des usines. Bienvenue dans l’empire des machikoba ou « usines de quartier », ces PME à partir desquelles le Japon a construit sa renommée économique au fil des décennies. Leurs noms sont inconnus du grand public, mais elles sont les meilleurs indicateurs de la santé du pays. « Si les machikoba s’enrhument, c’est l’ensemble du pays qui est malade », rappelle Satoshi Kosugi, chargé de la promotion des activités industrielles de l’arrondissement d’Ota. « C’est dans ces petites entreprises que se concentrent l’innovation et le travail de précision dont le Japon est si fier », ajoute-t-il en montrant du doigt plusieurs bâtiments dont les façades se ressemblent toutes.
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DISCRÉTION. Ici, pas de signes extérieurs de réussite. C’est à peine si le nom de l’entreprise est visible. « Les chauffeurs de taxi qui ne connaissent pas le quartier se cassent souvent la tête pour amener leurs clients à bon port. Ils sont obligés d’appeler l’entreprise où ils doivent se rendre pour être guidés à distance », sourit M. Kosugi. Il nous accompagne jusqu’à Material, une machikoba qui se distingue des autres par le style moderne de son architecture. Spécialisée dans la métallurgie et le façonnage de précision, l’entreprise est dirigée par une femme : Emiko Hosogai.
Avant de pénétrer dans l’atelier, on se déchausse pour enfiler des pantoufles. Quelques employés s’affairent autour de deux grandes machines dont il est difficile de deviner la fonction. « Elles servent à produire de petites pièces en carbone », explique Mme Hosogai, devançant la question. En dehors de la ventilation, le silence règne, y compris à l’étage où, sous une bâche bleue, nous attend le projet auquel Material et plusieurs autres entreprises de l’arrondissement ont contribué. Le ralentissement économique du pays a été préjudiciable aux machikoba ces dernières années et, plutôt que d’attendre le réveil des grandes entreprises nippones, certaines de ces PME ont décidé de prendre les devants et de se lancer dans une campagne de promotion de leur savoir-faire.
SIMPLICITÉ. « Nous avons beaucoup réfléchi au produit que nous pourrions proposer. Et puis, il y a eu le succès du roman La Fusée de Shitamachi, de Jun Ikeido [publié en France en novembre 2012 par Books Éditions, NDLR]. L’auteur y racontait le combat mené par une machikoba comme les nôtres, dans le contexte d’une économie mondialisée. Pas question de construire une fusée. Mais nous avons décidé de construire quelque chose de remarquable : un bobsleigh. Nous l’avons baptisé le « bobsleigh de Shitamachi » en référence au livre », raconte Satoshi Kosugi en découvrant le bolide noir. « C’est un concentré de technologie et de savoir-faire, tout en étant un objet extrêmement simple », ajoute Emiko Hosogai. L’idée est de faire de ce bobsleigh le symbole de la capacité technologique des machikoba, notamment à l’étranger. À moins d’un an des Jeux olympiques d’hiver de Sotchi, en Russie, le bobsleigh de Shitamachi pourrait bien aider les PME japonaises à remporter une nouvelle course et à mieux faire connaître leurs quartiers.
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