Ould Abdelaziz ou l’acte II de la démocratie mauritanienne

Publié le 14 août 2010 Lecture : 3 minutes.

J’ai été interpellé cent fois par des amis et d’autres, les uns me plaignant – pauvre Gaston –, les autres me moquant – il s’est bien planté – pour mon analyse de la Mauritanie, dont j’avais loué la grandeur du peuple et la qualité de la démocratie naissante. À travers le livre intitulé Les Hirondelles du printemps africain (éditions J.C. Lattès, 2008), je faisais l’éloge de ce pays autour de la personnalité d’Ely Ould Mohamed Vall, qui avait gardé le pouvoir dix-neuf mois pour mettre en place un régime démocratique. Quand, peu après, un coup d’État a éclaté à Nouakchott, l’on a pensé que j’allais renier mon analyse initiale. Il n’en est rien.

Je pourrais rappeler à ceux-là que la France, après la Révolution, est retournée à la monarchie et parfois à la barbarie – rétablissant même l’esclavage. Je pourrais leur parler des tâtonnements de la démocratie américaine, où les assassinats de présidents – barbarie encore – ont continué bien après l’indépendance. Alors, sans cautionner les coups d’État, est-il nécessaire de le rappeler, on peut néanmoins dire que celui de Mohamed Ould Abdelaziz, compagnon de Vall, avec qui il avait conquis le pouvoir en 2005, déçu par une alternance qui, quoique démocratique, pouvait, à cause de l’incurie d’un seul homme, précipiter le pays dans un chaos sans nom si rien n’était fait, paraîtra plus salutaire, plus patriotique et bien moins barbare que les modèles américain ou français.

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Août 2008, Abdelaziz dépose le président Sidi Ould Cheikh Abdallahi, qui, dans une dérive paranoïde, suspecte tout le monde, limoge des généraux, dont lui. Avril 2009, il démissionne de l’armée et de la présidence du Haut Conseil d’État qui dirigeait le pays afin de pouvoir se présenter à l’élection présidentielle prévue en juin. Elle sera reportée au mois de juillet à la demande des autres candidats. Août 2009, il devient président de la République. Ainsi, moins d’un an après le coup d’État, la Mauritanie revient sur la voie de l’alternance démocratique. Les hirondelles sont de retour dans le ciel de Nouakchott.

Août 2010, un an déjà, et il me plaît de revisiter ce pays que j’ai appris à aimer comme une seconde patrie, ce trait d’union entre l’Afrique du Nord et l’Afrique noire, avec ses hommes fiers et ses femmes altières. Rien n’est jamais acquis, surtout pas la démocratie, et le nouveau président n’hérite pas d’un long fleuve tranquille. L’opposition manifeste et se manifeste, demande le partage du pouvoir. Abdelaziz tient bon et demande à l’opposition de s’en tenir à son rôle d’opposant. Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) sème la mort. Le président fait preuve de fermeté, démontre sa détermination à combattre cette peste, mais aussi sa capacité à nouer des alliances fécondes avec les partenaires internationaux, notamment avec la France. Le dernier épisode en date – le raid coordonné avec la France contre une base d’Aqmi, le 22 juillet – confirme sa détermination à agir et le place en première ligne de cette lutte. L’otage français Michel Germaneau ne sera pas sauvé, mais les terroristes subiront de lourdes pertes.

Actif au niveau international, il prend de la hauteur au niveau national, pour l’intérêt de la démocratie et de la nation. Il rencontre l’opposition, comme le veut la loi, d’abord Ould Daddah, qui en est le chef incontesté, puis les autres membres de la Coordination de l’opposition démocratique (COD). Maintenant, il lui reste à relever les défis sociaux et économiques. On ne peut que lui souhaiter bonne chance. 

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Gaston Kelman est un écrivain franco-camerounais.

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