Des présumés djihadistes très encombrants

Rabat demande à Dakar l’extradition de trois Marocains soupçonnés d’être liés à Al-Qaïda.

Prison centrale de Reubeuss, à Dakar, où sont détenus les trois hommes. © AFP

Prison centrale de Reubeuss, à Dakar, où sont détenus les trois hommes. © AFP

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Publié le 17 août 2010 Lecture : 3 minutes.

Le 29 mai, trois Marocains ont été arrêtés à l’aéroport de Dakar, quelques minutes avant leur enregistrement pour une destination qui reste un mystère. Les autorités judiciaires marocaines soupçonnent Si Mohamed Nadane, Moulay Abdelhani Aldani et Mohamed Bright Nadane d’avoir voulu se rendre en Somalie, où ils devaient rejoindre un camp d’entraînement militaire. Les trois hommes, âgés de 30 à 35 ans, sont accusés d’être liés à la Jeunesse combattante islamique, une mouvance d’Al-Qaïda. Ils auraient été recrutés au Maroc et auraient préparé plusieurs attentats, dont l’un contre une gendarmerie du royaume, dans laquelle ils prévoyaient de voler des armes.

Selon l’avocat sénégalais des trois hommes, Me Assane Dioma Ndiaye, le Maroc a lancé contre eux un mandat d’arrêt international, qui a été formalisé le 1er juin. Depuis, les autorités marocaines ont demandé l’extradition des présumés terroristes. La cour d’appel de Dakar a donné un avis favorable le 29 juillet. Le sort des trois Marocains dépend à présent du président Abdoulaye Wade, qui a le dernier mot en matière d’extradition.

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Interrogés par la police, les trois hommes, originaires de Casablanca, ont déclaré qu’ils venaient du même quartier et qu’ils se connaissaient depuis longtemps. Ils se sont présentés comme des commerçants. La police les a arrêtés après avoir constaté qu’ils avaient effectué plusieurs allers-retours suspects en Afrique. Présents au Sénégal depuis un mois et demi, ils auraient quitté le Maroc le 24 avril et passé quelque temps au Kenya avant de rejoindre Dakar. « Ils n’ont pas su donner d’explications convaincantes à leur présence au Sénégal. Ils prétendent qu’ils font du tourisme et que leur destination finale était Kinshasa. Ils se seraient arrêtés à Dakar afin d’obtenir un visa pour le Congo. Mais ils n’ont pas vraiment l’air de touristes et ne semblent pas avoir beaucoup de moyens financiers », rapporte une source au Sénégal.

Leur avocat lui-même, sans attenter à la présomption d’innocence, laisse entendre que les trois hommes, qui portent la barbe, « pourraient avoir le profil de l’emploi ». S’ils ont bien du mal à opposer des arguments convaincants aux accusations dont ils font l’objet, ils « répondent eux-mêmes aux questions des juges, paraissent instruits et parlent très bien français », ajoute Me Ndiaye. « Lors de leur arrestation, ils n’avaient pas d’éléments compromettants sur eux. Il a cependant été établi qu’ils ont reçu des sommes d’argent dont l’origine reste suspecte », ajoute-t-il. L’avocat s’étonne par ailleurs que ses clients, qui étaient visiblement surveillés de près par les services marocains, aient pu sortir librement de leur pays, avec des passeports en règle.

Procès équitable

Incarcérés depuis deux mois à la prison centrale de Reubeuss, à Dakar, les trois hommes étaient présents lors de l’audience du 29 juillet et ont demandé aux juges de ne pas les extrader vers le Maroc. Selon leur avocat, qui est aussi l’ancien président de l’Organisation nationale des droits de l’homme (ONDH), ils craignent des mesures de rétorsion. « Je n’approuverai l’extradition que si on peut me garantir qu’ils auront droit à un procès équitable. Le Sénégal a ratifié la convention des Nations unies de 1984 contre la torture. Il ne peut donc renvoyer des gens vers un pays où ils risquent d’être maltraités », ajoute Me Ndiaye. Des propos qui pourraient embarrasser le président Wade, lequel entretient d’excellentes relations avec le roi Mohammed VI.

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Le contexte actuel risque en tout cas de n’être pas favorable à l’avocat. Après l’assassinat de Michel Germaneau par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et le double attentat de Kampala, qui a coûté la vie à 76 personnes, le 11 juillet, l’Union africaine a appelé tous ses États membres à lutter collectivement et activement contre le terrorisme. L’avocat a néanmoins l’intention de saisir la nouvelle ministre déléguée aux Droits de l’homme pour intercéder en faveur de ses clients auprès du président de la République.

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