Des adversaires désarmés
A priori, personne ne pourra battre Yoweri Museveni en 2011. Malgré le rétablissement du multipartisme en 2005, l’opposition peine à s’unir.
Yoweri Museveni l’inusable
Yoweri Museveni vient de nommer au sein de la commission électorale les mêmes membres que pour le scrutin de 2006, pourtant qualifié d’irrégulier par la Cour suprême ougandaise. Pour obtenir le renvoi des commissaires, des opposants politiques et civils manifestent déjà – au prix de séjours au commissariat. Mais sauront-ils profiter du multipartisme, rétabli en 2005, pour s’emparer de la tête de l’exécutif ? Le trophée paraît imprenable.
Cinq partis se sont rassemblés depuis août 2008 au sein de l’Inter-Party Cooperation (IPC) et doivent choisir un candidat unique le 23 août. Kizza Besigye, champion du Forum for Democratic Change (FDC), a de bonnes chances d’être désigné. Il a obtenu 28 % à la présidentielle de 2001 – il se présentait à l’époque en indépendant – et 37 % en 2006 pour le FDC. Cet ancien médecin personnel de Museveni est devenu le héros de l’opposition en Ouganda, d’autant plus populaire qu’il a été emprisonné pendant deux mois fin 2005. Autre candidat : Olara Otunnu, ex-numéro deux de l’ONU et président de l’Uganda People’s Congress (UPC). Ancien ministre des Affaires étrangères, il avait quitté le pays en 1986 lors de la prise de pouvoir de Museveni et n’y est revenu qu’à l’été 2009. Les autorités le prennent suffisamment au sérieux pour avoir lancé un mandat contre lui, le 4 août, après qu’il eut accusé Museveni de soutenir l’Armée de résistance du Seigneur (LRA). Or, sur ce sujet, il ne faut pas chatouiller le président, qui reste par ailleurs très populaire.
Dans le domaine de la sécurité, justement, il entretient une image de rempart. Depuis 1986, la LRA, rébellion « chrétienne » utraviolente du nord du pays, permet au régime d’apparaître solide. Et ce alors même qu’il n’a jamais réussi à arrêter son dirigeant, Joseph Kony – au point que certains soupçonnent Museveni de ne pas tout faire pour. La milice somalienne des Chabaab, qui a revendiqué les attentats du 11 juillet, pourrait reprendre le rôle de l’épouvantail sécuritaire. Face aux critiques émises par l’opposition sur la participation de l’armée ougandaise à la force de l’Union africaine en Somalie (Amisom), le conseiller pour les affaires politiques de Museveni, Moses Byaruhanga, interroge malicieusement dans la presse : « Quelle est l’opinion du candidat Besigye sur le terrorisme ? Peut-on lui faire confiance ? »
Et les législatives ?
Museveni est de ces hommes d’autant plus populaires qu’ils sont attaqués. Le royaume du Buganda, autour de la capitale Kampala, affiche son hostilité au régime. En septembre 2009, des affrontements entre les partisans du roi, le Kabaka Mutebi II, et les fidèles de Museveni avaient fait 30 morts. Aujourd’hui, l’organisation Suubi 2011, fondée par des anciens ministres du royaume, soutient « un changement très attendu aux prochaines élections ». Mais, selon un sondage du quotidien Daily Monitor, 52 % des Ougandais refusent que les institutions royales se mêlent de politique.
En février 2011, Museveni devrait donc encore triompher. Certains analystes, comme Isaack Otieno, directeur du programme Corruption et gouvernance de l’Institute for Security Studies (ISS, basé en Afrique du Sud), estiment que le changement en Ouganda viendra d’abord des législatives, qui se tiendront en même temps. Selon lui, « de jeunes leaders vont essayer d’intégrer le National Resistance Movement (NRM), au pouvoir, et de réformer le pays par le Parlement ». Le multipartisme a besoin d’encore un peu de temps pour solidifier la démocratie.
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