Bientôt des bus « made in Cameroun »
Le 21 juillet, une entreprise du pays a signé avec le chinois Genertec un accord pour la construction de la première usine de bus en Afrique centrale.
Des bus, tracteurs et voitures « made in Cameroon ». C’est le rêve de Zacharia Awanga, importateur et président-fondateur de la banque National Financial Credit. Depuis 2006, cet entrepreneur anglophone fait avancer son projet d’usine de montage en partenariat avec un industriel chinois. Objectif : fabriquer et vendre des véhicules neufs 35 % moins chers que sur le marché d’importation, et approvisionner à partir du Cameroun l’Afrique centrale et le Nigeria, saturés de bus d’occasion.
Après plusieurs visites à Pékin et la création en février d’Intercontinental Business Development (IBD), la société camerounaise porteuse du projet, Zacharia Awanga a finalisé le 21 juillet son premier accord avec CMC, filiale du gigantesque conglomérat industriel public chinois Genertec. Il prévoit la mise en place d’une chaîne de montage de bus à Bamenda, principale ville de l’Ouest anglophone. L’initiative a reçu le soutien des autorités : le 20 juillet, les délégués de Genertec, menés par leur président He Tongxi, et ceux d’IBD ont été reçus et encouragés par le Premier ministre, Philémon Yang.
Le projet commencera par la production de bus, puis de tracteurs, et enfin, éventuellement, de véhicules particuliers, tous fabriqués à partir de pièces importées. À chaque étape, les deux parties, chinoise et camerounaise, signeront un nouvel accord. L’ensemble du projet nécessiterait un investissement d’environ 305 millions d’euros.
« La production de bus démarrera d’ici à un an. Nous devrions en fabriquer 1 000 chaque année. À terme, l’usine devrait employer autour de 1 000 personnes », estime Zacharia Awanga, qui précise : « Les cadres seront majoritairement chinois au départ, puis seront remplacés progressivement par du personnel camerounais formé en Chine. »
Le milieu des affaires est circonspect. Albert Bengala, président de Cenainvest, société de capital-risque dédiée à l’Afrique centrale, qui a déjà investi dans des sociétés de transport, s’inquiète de la qualité des bus : « Les industriels asiatiques ont pour habitude de fabriquer en Afrique des véhicules peu chers. Mais souvent la qualité manque, alors qu’elle est essentielle pour affronter le réseau routier délabré. Des bus peu fiables risqueraient de décourager les acheteurs rapidement. » « Nous prévoyons des bus simples mais tropicalisés, donc adaptés à nos routes », rétorque Isaïe Nana, directeur général d’IBD.
Des débouchés au Nigeria
Le choix de Bamenda pose aussi question : « Pourquoi ne pas avoir préféré le port de Douala ? Le transport des pièces détachées chinoises par une route de montagne sinueuse risque de poser problème », remarque Albert Bengala. Zacharia Awanga défend son choix : « La région du Sud-Ouest bénéficie d’infrastructures de très bonne qualité. Les conteneurs de pièces passeront sans problème. Et le corridor routier Bamenda-Enugu, en cours de bitumage, mettra le Nigeria, principal client de nos véhicules, à deux heures de route. Enfin, avec un climat plus frais qu’à Douala, la climatisation de l’usine, et surtout des machines, ne sera pas nécessaire, ce qui permettra des économies majeures. »
Tous les acteurs consultés confirment qu’un marché existe bien pour les bus neufs : « Les sociétés Le Car et Le Bus de Yaoundé et la Socatur de Douala doivent renouveler leur parc, confie Albert Bengala. Les villes nigérianes organisent leurs transports publics. Tous auront besoin de bus neufs et il n’existe pour le moment aucun assembleur en Afrique centrale. On ne peut nier qu’il existe une opportunité de business… à condition que la qualité soit au rendez-vous. »
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