Que devient Mounfida Tlatli ?
C’est dans un hôtel loin des bruits de la ville, sur les hauteurs de Gammarth, que le rendez-vous a été fixé. Moufida Tlatli arrive en catimini. Elle a le regard d’un chat apeuré, la parole gorgée de larmes. Depuis des mois, la plus grande cinéaste tunisienne ne s’aventure plus hors de sa maison, où elle s’était calfeutrée, endeuillée par la disparition d’êtres chers. La discussion ne cesse de s’orienter vers les morts. Difficile de parler cinéma…
Certains affirment qu’elle l’a abandonné. Elle n’aurait pas supporté la notoriété que lui a apportée le succès de son premier film, Les Silences du palais. Une chose est sûre : son dernier scénario, Les Petites Mains, qui avait été refusé par les anciens responsables de la Commission d’aide du ministère de la Culture au motif que l’évocation d’un personnage considéré comme pédophile porterait atteinte aux bonnes mœurs, vient de recevoir l’aide à la production accordée par la nouvelle administration.
Depuis La Saison des hommes, Tlatli a réalisé Nadia et Sarra, un téléfilm commandé par la chaîne franco-allemande Arte. La réalisatrice française à succès Agnès Jaoui lui a proposé de coproduire Les Petites Mains. Et cela semble la rendre heureuse. L’espace de quelques secondes, seulement. Lorsqu’elle se lève pour partir, elle laisse derrière elle l’écho de sa profonde détresse, l’image de ses larmes, et son rire, comme ultime arme contre le drame. L’on se met alors à espérer pour elle. Et à douter aussi.
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