Frime partout, fête nulle part (ou presque)
Jet-set : le Maghreb bling-bling
Inexistante, la jet-set algérienne ? Voire… Certes, le pays, marqué par une décennie de guerre civile sanglante et boudé par les touristes occidentaux, ne regorge pas de hauts lieux pour « faire la fête ». Mais ce ne sont pas les riches qui manquent. Rejetons de familles aisées, enfants de la nomenklatura, jeunes entrepreneurs, importateurs ayant profité de l’ouverture économique amorcée au début des années 1990…
L’Algérie compterait aujourd’hui quelque 46 000 milliardaires en dinars (1 milliard de dinars équivaut à 10,5 millions d’euros), selon des statistiques fournies l’année dernière par le quotidien arabophone Echourouk. Une nouvelle génération de riches a vu le jour au cours des vingt dernières années. Et elle entend bien en profiter.
Hélas, à Alger, les boîtes de nuit ne sont pas légion. On les trouve dans les grands hôtels de la capitale tels qu’El Djazaïr (ex-Saint-George), le Hilton, le Sofitel ou le Sheraton. Dans ces lieux pris d’assaut le week-end, la bouteille de vodka ou de whisky coûte au moins 12 000 dinars (130 euros), tandis qu’une bouteille de champagne vaut 18 000 dinars : un petit luxe qui n’est pas à la portée de toutes les bourses, mais qui peine à satisfaire les plus aisés. « Les vrais riches vont ailleurs, explique Zoheir, un habitué de ces endroits. Ils préfèrent les villes étrangères où ils ont la certitude de pouvoir s’amuser dans un total anonymat. » Les noceurs fortunés s’envolent donc vers Marrakech, Casablanca, Monaco, Ibiza, Beyrouth, Shanghai, Barcelone ou Dubaï.
Étalage de richesses
Toutefois, la manne pétrolière qui s’est déversée sur l’Algérie au cours des dix dernières années – le pays a engrangé plus de 400 milliards d’euros de recettes en hydrocarbures – a largement contribué à l’émergence d’une nouvelle faune de nantis qui n’a pas honte de faire étalage de ses richesses. Villas avec piscine, voitures rutilantes, yachts, jet-skis… L’argent permet tout.
Le marché des voitures de luxe (4×4, grosses berlines, Hummer) a explosé, et les concessionnaires automobiles commercialisent sans peine des voitures à 9 millions de dinars. Celui des piscines, spas et autres jacuzzis n’est pas en reste. On recense plus d’une vingtaine d’entreprises spécialisées dans ce secteur, totalement inexistant il y a vingt ans. Desjoyaux, installé en Algérie depuis 1999, construit en moyenne 300 bassins par an, pour un prix qui oscille entre 3 millions et 5 millions de dinars.
Mais le must reste l’acquisition d’un yacht ou d’un voilier. Compter au minimum 4,5 millions de dinars. L’engouement est tel que les marinas, notamment celle de Sidi Fredj (30 km à l’ouest d’Alger), sont littéralement prises d’assaut… et que le gouvernement a instauré une taxe de 250 000 dinars sur l’achat des bateaux de plaisance. Qu’importe : patron d’une entreprise d’agroalimentaire, Lyes, 40 ans, n’a pas résisté à la tentation de s’offrir un petit yacht, qu’il a acheté à Barcelone avant de le faire acheminer vers le port de Béjaïa. « Une virée en mer avec des amis est le meilleur moyen d’oublier le stress du quotidien », dit-il.
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