Présidentielle : le peuple guinéen face à son destin
Pour la première fois de leur histoire, les Guinéens vont prendre part, le 27 juin, à une élection présidentielle libre et transparente. Qui l’emportera ?
La Guinée face à son destin
La Guinée s’apprête à vivre un événement historique : après cinquante-deux années d’indépendance, elle va connaître sa première élection démocratique et transparente. Vingt-six ans de Sékou Touré, vingt-quatre ans de Lansana Conté, un an de Moussa Dadis Camara et quelques mois de Sékouba Konaté : le premier territoire subsaharien de la France à s’être émancipé n’aura pas rêvé longtemps après la proclamation de sa souveraineté… « Nous préférons la liberté dans la pauvreté à la richesse dans l’esclavage », avait déclaré Sékou Touré, le 25 août 1958, en annonçant son refus de la Communauté proposée par le général de Gaulle. L’histoire contemporaine de la Guinée n’aura finalement été qu’un grand gâchis. Si la pauvreté fut bien fidèle au rendez-vous, la liberté promise par « Sékou » n’était qu’une chimère. Le rêve révolutionnaire et nationaliste évanoui, le pays s’est enfoncé dans une lente mais inexorable descente aux enfers. Les autocrates se succédèrent, l’arbitraire, l’incurie et le pillage organisé de la nation furent érigés, cinq décennies durant, en principes de gouvernance.
Les Guinéens (4,2 millions d’électeurs) choisiront donc librement, le 27 juin, l’homme ou la femme qui les dirigera au cours des cinq prochaines années. Par la même occasion, les militaires remettront le pouvoir, entre leurs mains depuis un quart de siècle, aux civils. Certains doivent se frotter les yeux. Il y a quelques mois à peine, personne ne pouvait imaginer une telle issue. Mais le destin d’une nation dépend parfois de si peu de chose… Depuis la mort du général-paysan Lansana Conté, le 22 décembre 2008, la Guinée s’est réveillée d’un long sommeil et l’Histoire s’est emballée. De nouvelles perspectives s’offraient alors à une population qui semblait se résigner à subir l’effarante malédiction qui l’avait frappée. Un capitaine inconnu, apparemment pétri de bonnes intentions, prit le pouvoir à la surprise générale, pour finalement se révéler n’être qu’un satrape mégalomane et schizophrène en treillis.
C’est, hélas, la sanglante répression du 28 septembre 2009 qui aura tout changé. Un pas de plus vers le chaos, mais aussi le déclencheur de la chute de Dadis. Pour aboutir à ce remake tropical de Petits Meurtres entre amis au cours duquel Toumba Diakité, l’aide de camp-bouc émissaire, tirera sur son chef. Nouvel épisode dramatique de ce mauvais feuilleton, nouveau coup de théâtre : le pouvoir est (encore) à prendre. Il échoit, par extraordinaire, au seul homme qui n’en avait jamais voulu. Le seul, aussi, à pouvoir contenir les accès de fièvre prédatrice d’une armée erratique, habituée à se servir sur la bête et à ne jamais rendre aucun compte. Un scénario inimaginable pour tant de Guinéens qui avaient fini par perdre espoir, après un demi-siècle d’un coma qui se révèle, finalement, réversible. Le temps est proche où ce grand peuple, qui ne manque ni de bras ni de cerveaux, pourra enfin accomplir son véritable destin, celui d’une nation au potentiel inouï, à qui la nature a tout donné et qui mérite tellement mieux que les dirigeants qui se sont jusqu’ici succédé à sa tête…
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