Le ménage continue

La récente crise de la Banque des États d’Afrique centrale a entraîné une profonde refonte de l’équipe de direction. Sur les six dirigeants de l’établissement encore en place en janvier, il n’en reste aujourd’hui plus qu’un.

Une nouvelle équipe entoure le gouverneur de la Beac. © Diego Ravier pour J.A.

Une nouvelle équipe entoure le gouverneur de la Beac. © Diego Ravier pour J.A.

Publié le 16 juin 2010 Lecture : 3 minutes.

Conséquences des malversations du bureau parisien, rivalités de pouvoir entre États, conflits larvés entre les dirigeants de l’institution… Les raisons ne manquent pas, depuis le début de l’année, pour faire valser les têtes à la Beac. Après les limogeages de Philibert Andzembé, le gouverneur, et de Rigobert Roger Andély, le vice-gouverneur, lors du sommet des chefs d’État de la Cemac, à Bangui, du 15 au 17 janvier 2010, la direction de la Banque centrale a de nouveau reçu un violent coup de torchon.

Le dénouement a eu lieu à Brazzaville, le 7 juin, dans le huis clos de la réunion extraordinaire des six chefs d’État de la Cemac. Cette fois, ce sont le Tchadien Abbas Mahamat Tolli (secrétaire général), le Centrafricain Théodore Dabanga (directeur du contrôle général) et le Camerounais René Mbappou Edjenguele (directeur des études, des finances et des relations internationales) qui sont remerciés.

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Des six membres du gouvernement de la Beac en poste au début de l’année, il ne reste que l’Équato-Guinéen Lucas Abaga Nchama, ex-directeur général de l’exploitation nommé gouverneur à Bangui. « La conférence [des chefs d’État, NDLR] a constaté la persistance du dysfonctionnement au sein de l’institution d’émission. Pour y remédier et sauvegarder le bon fonctionnement de la Banque, elle a décidé des mesures individuelles », justifie le communiqué final. En clair, le ménage continue.

Une nouvelle équipe entoure le gouverneur au caractère bien trempé, dont la gestion ne fait pas l’unanimité. Priorité aux hommes du sérail. Quatre des cinq personnes désignées sont « de la maison », même si elles ne gravitaient pas dans les allées du pouvoir. Le Tchadien Tahir Hamid Nguilin, désormais vice-gouverneur et bras droit de Lucas Abaga Nchama, est un cadre des services généraux. Il ne figurait pas parmi les trente premiers dirigeants de la banque. Le Gabonais Joachim Lema Okili franchit un échelon hiérarchique en accédant à la direction générale des études et des relations internationales. Le poste de secrétaire général, troisième personnage de la Beac, revient au Congolais Daniel Ngassiki, jusque-là second adjoint à la direction nationale à Brazzaville. Quant à Jean-Michel Monayong Nkoumou, directeur général du contrôle, il dirigeait l’agence de Douala. « Le management du gouverneur consiste à envoyer les cadres du siège dans les bureaux nationaux et à faire venir à Yaoundé des cadres des instances décentralisées », constate l’un d’eux, contraint à l’expatriation.

Dans cette garde rapprochée taillée sur mesure pour le gouverneur, seul le Centrafricain Yvon Bertrand Songuet, le directeur général de l’exploitation, vient de l’extérieur. Et encore. Chargé de mission au ministère des Finances et du Budget à Bangui, il est l’un des huit membres du comité d’audit mis en place en 2009 par la Beac pour faire la lumière sur les malversations de son bureau parisien. « C’est un jeune, intègre mais un peu inexpérimenté », juge l’un de ses collègues.

Ce grand coup de balai a surpris jusqu’à certains des administrateurs de la Banque. Un groupe de travail devait présenter ses conclusions sur le mode de gouvernance de l’institution lors du prochain conseil d’administration de la Beac, le 24 juin. On devait y débattre d’un éventuel recours à une équipe restreinte, indépendante des États, recrutée en fonction de ses compétences, à l’instar de ce qui se fait dans toutes les banques centrales du monde. Une évolution recommandée par la France et par le FMI. Pas sûr que ces derniers apprécieront le tour de force du 7 juin, qui aboutit au maintien du système…

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