Floribert Chebeya, infatigable défenseur des droits de l’homme

Floribert Chebeya était une figure de la société civile, consultée par les Nations unies, et luttant sur les terrains les plus sensibles depuis la fin des années 1980.

Floribert Chebeya, à Bruxelles, le 7 avril 2005. © AFP

Floribert Chebeya, à Bruxelles, le 7 avril 2005. © AFP

Publié le 9 juin 2010 Lecture : 2 minutes.

Floribert Chebeya n’a pas écouté son ami Dismas Kitenge, président de Lotus, un groupe de défense des droits de l’homme. « Je lui ai conseillé plusieurs fois de quitter le pays, pour se protéger. Mais il refusait, disait que c’était lâche. » Le 2 juin, à l’aube, le cadavre du directeur exécutif de la Voix des sans-voix (VSV) a été découvert sur la banquette arrière de sa petite Mazda grise, dans le quartier Mitendi, à Kinshasa. Le lendemain, son épouse identifiait son corps à la morgue de l’hôpital général. Selon un témoignage, il ne portait pas de traces de violences, sinon une plaie au-dessus d’un œil. Le cou était en revanche gonflé, le nez et les oreilles ensanglantés.

« Ce n’était pas un polémiste »

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Floribert Chebeya, 47 ans, père de trois enfants, était à la tête de l’une des toutes premières ONG de protection des droits de l’homme du pays. À la fin des années 1980, avec un ami, l’ancien étudiant de l’Institut supérieur de commerce de Kinshasa crée la VSV. À l’époque, les droits de l’homme sont l’affaire du seul Mouvement populaire de la révolution, le parti unique. La VSV défend sa cause, les prisonniers politiques, dans la clandestinité. Avec les années 1990 vient le multipartisme. L’association commence à travailler au grand jour. Floribert Chebeya abandonne son emploi de comptable pour s’y consacrer à plein temps. Depuis, il multipliait les enquêtes et les plaidoyers sur les sujets sensibles : suppression de la Cour d’ordre militaire (tribunal d’exception) instituée par Laurent-Désiré Kabila, procès équitable pour les assassins présumés de ce dernier, prise en compte de la société civile lors de négociations de paix, lutte contre les fraudes électorales, les arrestations arbitraires… Sa réputation dépassait les frontières congolaises. « Ce n’était pas un polémiste, mais un type humble, réservé, d’une intelligence vive, doté du sens de la nuance », témoigne un diplomate. Mi-mai, il figurait parmi les trois représentants d’ONG entendus par le Conseil de sécurité des Nations unies en visite à Kinshasa.

Le 1er juin, en fin d’après-midi, Floribert Chebeya s’est rendu à l’Inspection générale de la police, où il était convoqué. Et son épouse n’a plus eu de nouvelles. Le lendemain, un communiqué signé par l’inspecteur provincial de la police de Kinshasa, le général Oleko, expliquait que les agents de la sécurité avaient « découvert le cadavre d’un homme sans aucune trace visible de violences, dont la tirette du pantalon était ouverte et à côté duquel se trouvaient deux préservatifs déjà utilisés (…), une boîte de stimulants Da Vigra (…), deux ongles artificiels et quelques mèches pour dames. » Les défenseurs des droits de l’homme payant actuellement un lourd tribut en RD Congo, l’entourage du défunt ne croit pas à un meurtre crapuleux.

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