Le gâteau pétrolier ne se partage pas

Sur le marché en plein essor des produits raffinés, les grosses compagnies raflent tout. Elles comptent sur l’État pour assainir le secteur et, partant, mettre les petits opérateurs définitivement hors course.

La société nationale Cobil (ici, à Lubumbashi) ne gère que 10% de la distribution. © Gulda el Magambo pour J.A

La société nationale Cobil (ici, à Lubumbashi) ne gère que 10% de la distribution. © Gulda el Magambo pour J.A

Publié le 11 juin 2010 Lecture : 3 minutes.

Une consommation de quelque 792 000 m3 en 2009 et une prévision de 1,14 million de m3 en 2010 (+ 44 %)… Le marché des produits pétroliers raffinés est en pleine expansion en RD Congo. Une envolée qui ne profitera qu’aux « gros » fournisseurs et distributeurs. En 2009, sur la bonne trentaine d’importateurs-fournisseurs – la plupart des sociétés exercent les deux métiers –, seule une poignée de grands acteurs, dont Glencore, le leader, Addax Petroleum, Arcadia, Trafigura et Total Outre-Mer, assuraient déjà près de 90 % de l’approvisionnement du pays.

Des juniors, dont Orion Oil et Sapro Oil, se partageaient le reste. Et il y a peu de chances qu’ils montent davantage en puissance sur ce marché très disputé. Leur développement est bridé par l’insuffisance et le mauvais état, selon un industriel, des installations de stockage du pays, lesquelles sont gérées par les Services des entreprises pétrolières congolaises (SEP-Congo) – dont le capital est détenu à hauteur de 36,6 % par la Congolaise des hydrocarbures (Cohydro) – et par la Société congolaise des industries de raffinage (Socir), dont l’activité raffinage est à l’arrêt depuis 2000.

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« Pour augmenter nos parts de marché, il faut obtenir de bons prix, et donc négocier avec les raffineurs et les transporteurs, explique cet industriel. Mais ensuite, il faut pouvoir stocker la marchandise. Or les espaces de stockage sont accaparés par les grands. Il faudrait donc les augmenter. » Les leaders ont les moyens de faire face, ayant, pour certains, largement investi dans le stockage, notamment en Afrique de l’Ouest. De leur côté, les juniors entreposent les produits en offshore quand ils n’ont pas d’installations propres ou que celles-ci sont insuffisantes. Du coup, ils ne sont jamais sûrs d’honorer les contrats. « Les sociétés doivent fournir au minimum 3 500 m3 de produits par an, indique un conseiller technique du ministère des Hydrocarbures. On fait une première évaluation après un an d’activité, puis chaque année. Sur la base des résultats, on renouvelle ou non le contrat. » Une vraie épée de Damoclès au-dessus de la tête des « petits ».

Une activité de survie

Dans la distribution des produits pétroliers, leur sort est tout aussi peu enviable. En 2009, trois majors occupaient environ 60 % du marché : Fina Congo (26 %), Engen RDC (20,6 %) et Elf Oil RDC (13 %). Cobil, née du rachat de Mobil Oil par l’État congolais, occupait 10 % du marché. Et Sonangol-Congo, filiale de la société nationale angolaise dans laquelle l’État congolais détient 40 % du capital, était très marginale (1,9 %). Quant à Congo Oil (0,6 %) – dont le capital est détenu à égalité par Cohydro et Sapro Oil – et Cohydro (0,4 %), elles jouent un rôle encore plus restreint.

Pour faire face, les indépendants se sont regroupés dans trois organisations et occupent ainsi la tête du marché en totalisant 26,4 % des parts. En théorie. Leur position de leader est très illusoire. Les indépendants seraient quelque 180 opérateurs, la majorité ne possédant qu’une pompe à essence. « C’est une activité de survie pour nombre d’entre eux », relate le gérant d’une station-service.

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Préoccupés par les risques environnementaux que représentent la plupart de ces opérateurs ainsi que les petits transporteurs, tout aussi nombreux – plus d’une centaine en 2009 –, dont les équipements ne répondent guère aux normes de sécurité, les pouvoirs publics veulent mettre de l’ordre. Ce qui fait réagir ce transporteur : « Il y a des problèmes de sécurité, oui. Mais pour que les indépendants investissent, il faudrait des financements. Or le système bancaire ne prête pas. À terme, ils seront avalés par les sociétés étrangères qui profiteront du boom. » Une fin programmée.

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