Brut et plus, si affinités

Le secteur pétrogazier reste la locomotive de l’économie. Il est cependant en pleine réorganisation, avec, en particulier, l’ouverture à de nouveaux partenaires et le développement des filières en aval.

Publié le 11 juin 2010 Lecture : 5 minutes.

Malabo maintient le cap
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Malabo maintient le cap

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Les hydrocarbures sont le cœur et le moteur de l’économie équato-guinéenne. Toutefois, à la suite du recul de la production et de la baisse des cours en 2009, et compte tenu de la diversification de l’économie (en particulier dans le BTP, l’agriculture et la pêche, le tourisme, les transports et les services financiers), la contribution du secteur au produit intérieur brut (PIB) du pays diminue. Elle est passée de 92 % en 2007 à 73 % en 2009, et devrait se « réduire » à 69 % en 2010. L’occasion pour les autorités et les acteurs du secteur de réorganiser leur stratégie.

Avec une production (pétrole et gaz naturel) de 318 700 barils/jour (b/j) en 2009, le pays – dont les réserves prouvées dépassent 1 milliard de barils de brut – s’est hissé au rang de trentième producteur mondial et de troisième producteur en Afrique subsaharienne. L’Angola (près de 13 milliards de barils de réserves prouvées) a pris la tête du classement, avec une production de 1,9 million de b/j, devant le Nigeria. Ce dernier, malgré ses 36 milliards de barils de réserves prouvées, est pénalisé par l’insécurité dans la région du Delta du Niger et a vu sa production de brut passer de plus de 2 millions de b/j en 2008 à 1,8 million en 2009. Et selon les derniers chiffres consolidés disponibles, qui portent sur l’exercice 2008, avec 361 000 b/j de brut et de gaz naturel, la Guinée équatoriale devançait ses voisins d’Afrique centrale, le Congo-Brazzaville, le Gabon et le Cameroun (voir tableau page suivante).

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La production de brut est assurée par 6 champs. Le plus important est Zafiro (44 % de la production totale), dont l’opérateur principal reste l’américain Exxon. Viennent ensuite Okumé (23 %), opéré par l’américain Hess ; Alba (18 %), par le texan Marathon Oil ; Ceiba (12 %), par Hess ; puis Jade et Serpentina (3 %), par Exxon.

Après un pic en 2008, la production a entamé sa phase descendante en 2009 avec une baisse de près de 12 % (318 700 b/j), et les projections pour 2010 tablent sur une production d’à peine plus de 292 100 b/j, en recul de 8,3 %. Seule la découverte de nouveaux gisements permettrait de relancer la production, d’où l’octroi de contrats d’exploration à divers opérateurs américain (Vanco Energy), britanniques (Starc Limited et Glencore), espagnol (Repsol), chinois (Santa Isabel Petroleum Company et CNONC) et sud-africain (Petrosa).

À court terme, l’espoir repose sur le champ Aseng, sur le nouveau site de Benita. Découvert en 2007 dans le nord-est de l’île de Bioko (dans le bloc 1), à environ 1 000 m de profondeur, ce champ est opéré par l’américain Noble Energy (40 %), le nigérian Atlas Petroleum International (25 %), le britannique Glencore Exploration (25 %), Osborne Resources (6 %, filiale du suédois PA Resources) et GE-Petrol, la compagnie nationale (5 %). C’est le français Technip qui en assure le développement, pour un investissement de 1,3 milliard de dollars. Aseng pourrait entrer en production dès 2012, avec une capacité de 50 000 b/j.

GNL : entre bon voisinage et concurrence

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Pour compenser le recul des recettes pétrolières et créer davantage de valeur ajoutée, la Guinée équatoriale a misé sur la transformation du gaz naturel, en particulier sur les champs Zafiro, Alba et Ceiba. La production d’hydrocarbones – méthanol, butane, propane, gaz de pétrole liquéfié (GPL) et, surtout, gaz naturel liquéfié (GNL) – a explosé, passant de 37 300 barils-équivalent pétrole/jour (bep/j) en 2006 à 143 200 bep/j en 2009. La production de méthanol est réalisée dans le complexe pétrochimique de Punta Europa, proche de la capitale, par Atlantic Methanol Production Company (Ampco), un consortium comprenant Marathon Oil, Noble Energy et la compagnie nationale Sonagas (10 %).

Avec près de 37 milliards de m3 de réserves prouvées, le produit phare reste toutefois le GNL. La mise en service, en 2007, d’un premier train GNL alimentant l’unité de liquéfaction d’Ecuatorial Guinea-Licuado Natural Gas (EG-LNG) située à Punta Europa a permis à la Guinée équatoriale de devenir l’un des quinze pays dans le monde dotés d’installations de transport et de liquéfaction de gaz naturel. EG-LNG, dont le capital est détenu à 60 % par Marathon Oil et à 25 % par Sonagas, traite également le gaz du Nigeria et du Cameroun. L’objectif est de porter la capacité de production de 3,4 à 3,7 millions de tonnes par an.

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Afin de faire du pays un hub gazier régional, les autorités équato-guinéennes ont en projet la mise en service d’un second train GNL. Un accord a été signé en 2008 à cet égard entre le géant russe Gazprom et EG-LNG, suivi, en janvier 2009, par la création du consortium 3G, comprenant la Sonagas, le portugais Galp Energia, l’espagnol Union Fenosa et l’allemand E.ON Ruhrgas. D’une capacité de 4,4 millions de tonnes (soit près de 32 millions de bep), le projet représente un investissement de l’ordre de 5 milliards de dollars.

Pour optimiser l’utilisation de ce site, des conventions de transformation de gaz étaient en négociation avec le Nigeria et le Cameroun. Mais, outre la baisse de 5 % de la demande internationale, divers facteurs, notamment géopolitiques, gèlent momentanément la réalisation du second train. Malgré l’arrivée de Goodluck Jonathan aux commandes du pays, le Nigeria ne semble pas disposé à s’impliquer davantage dans le projet pour le moment.

Difficile, enfin, de trouver une solution du côté de l’Angola, qui a de fortes ambitions dans ce domaine, ou du Cameroun, qui envisage lui aussi la construction d’un train GNL à Kribi, avec GDF-Suez. Un projet qui mettrait les deux pays en concurrence frontale… Du coup, la réalisation du second train de liquéfaction a été repoussée à 2016. Un manque à gagner momentané, le gigantesque potentiel en gaz existant ne pouvant être absorbé par le seul train GNL dont dispose le pays.

Projet de raffinerie à Mbini

En attendant, pour pallier la baisse annoncée des recettes pétrolières, les autorités s’attellent au développement de l’aval du secteur et misent sur le raffinage, notamment avec le projet de création d’une raffinerie à Mbini, dans la région continentale.

Annoncé le mois dernier, le développement de la future usine ainsi que le choix du ou des partenaires sont en cours de négociation : l’objectif est d’assurer la transformation du brut en essence, gasoil, diesel, kérosène, lubrifiants et asphalte, jusqu’à présent achetés à grands frais à GE-Total. D’une capacité de 20 000 b/j, qui pourrait être poussée à 80 000 ou à 100 000 b/j, selon les besoins, la raffinerie couvrirait largement la consommation nationale, en forte hausse, avec l’essor du parc automobile (+ 16 % en 2009) et la multiplication des projets de BTP, très consommateurs de produits pétroliers. La consommation nationale est ainsi passée de 40 000 tonnes de produits raffinés en 2000 à quelque 300 000 tonnes en 2009. Les excédents seraient quant à eux exportés dans la sous-région, où les besoins augmentent également.

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