Sur un air de revanche

En quinze ans, le petit pays, mi-insulaire mi-continental, jadis parmi les plus pauvres d’Afrique, est devenu l’un des plus riches grâce aux hydrocarbures. Non content du succès de son économie, qui se diversifie, il enchaîne aussi les premiers rôles sur la scène diplomatique.

Le palais présidentiel, à Malabo. © Renaud Van der Meeren/Les Éditions du Jaguar

Le palais présidentiel, à Malabo. © Renaud Van der Meeren/Les Éditions du Jaguar

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Publié le 3 juin 2010 Lecture : 3 minutes.

Malabo maintient le cap
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Malabo maintient le cap

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Il fut un temps où la Guinée équatoriale, sans autres ressources que des plantations de cacao à l’abandon, ne comptait pour personne en Afrique, pas même pour ses voisins d’Afrique centrale, et vivotait loin des yeux et des intérêts du monde. Pour subsister, ses dirigeants étaient condamnés à compter sur la générosité de leurs homologues de la sous-région… Jusqu’à ce que, il y a une quinzaine d’années, le début de l’exploitation des hydrocarbures vienne modifier la donne. Depuis, grâce aux énormes recettes engrangées par la manne pétrolière, la Guinée équatoriale investit sans répit pour aménager son territoire et développer son économie. Jusqu’à être aujourd’hui courtisée par les majors et les entrepreneurs du monde entier, dans des secteurs d’activité de plus en plus divers.

Même changement d’attitude vis-à-vis d’elle de la part des grands du continent. À commencer par ses voisins. Et à la lumière du sommet des chefs d’État de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) organisé à Bangui, en Centrafrique, à la mi-janvier, il est clair que Malabo veut jouer dans la cour des grands. En tout cas, le président équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema a remporté une indéniable victoire diplomatique en obtenant ce qu’il exigeait depuis de longues années : la fin du monopole gabonais, plus que trentenaire, sur la direction de la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac), dont la Guinée équatoriale est le plus important contributeur. Elle en a désormais pris les commandes pour sept ans.

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Deux circonstances ont joué en faveur d’Obiang Nguema : la disparition d’Omar Bongo Ondimba, farouchement opposé de son vivant à toute modification de l’ordre établi par le consensus de Fort-Lamy, ainsi que le scandale financier qui a secoué la Beac, et que Jeune Afrique avait révélé en septembre 2009. Cerise sur le gâteau, c’est à la Guinée équatoriale qu’incombe la tâche de mener le train de réformes au sein de la Cemac. Des réformes qu’elle réclamait depuis longtemps. Enfin, en ce qui concerne le différend relatif à l’île de Mbanié, portant sur la frontière maritime entre le Gabon et la Guinée équatoriale, plutôt que l’affrontement, les deux pays ont choisi la négociation sous la supervision d’un médiateur international.

En quête de reconnaissance

Depuis le décès d’Omar Bongo Ondimba, et même s’il n’a que 68 ans (contre 77 ans pour le Camerounais Paul Biya), le président Obiang Nguema, à la tête de la Guinée équatoriale depuis 1979, est devenu le doyen des chefs d’État de l’Afrique subsaharienne en termes de longévité au pouvoir. Conscient du poids financier de son pays, mais aussi de l’image et des prérogatives diplomatiques qui vont avec, il ne cesse d’élargir le cercle de ses amis, transformant Malabo en passage obligé. Ce cercle va du roi du Maroc, Mohammed VI, au Sud-Africain Jacob Zuma, en passant par l’Ivoirien Laurent Gbagbo, le Burundais Pierre Nkurunziza et le Guinéen Sékouba Konaté, parmi d’autres.

Souvent accusée de torpiller les efforts de la Cemac en matière de libre circulation des personnes, la Guinée équatoriale doit mettre beaucoup d’eau dans son vin si elle veut assumer ce leadership auquel elle aspire. Même si elle met en avant le fait qu’elle a plus d’une fois été victime de tentatives de débarquement de mercenaires ou d’attaques de pirates. Les expulsions de ressortissants des autres pays membres de la Cemac, notamment, sont mal vécues par ces derniers, qui estiment que Malabo ferme ses frontières au moment même où l’on prépare l’institution d’un passeport communautaire.

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L’ouverture économique du pays et l’accueil d’événements internationaux accéléreront peut-être l’assouplissement des conditions d’entrée sur le territoire. Les autorités planchent actuellement sur la mise en place d’un visa spécial pour la CAN 2012, donnant accès au Gabon et à la Guinée équatoriale.

Afin de diversifier son économie encore fortement dépendante des hydrocarbures, Malabo s’engage dans la diversification et poursuit, sans relâche et à grands pas, son programme de construction d’infrastructures. Son prochain défi, et pas le moindre : réussir à améliorer le niveau de vie et de formation de l’ensemble de sa population.

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