Masekela, force tranquille

Le chanteur et trompettiste que les Sud-Africains surnomment « Brahugh » est en concert en Europe. Son nouvel album se veut à l’image de son état d’esprit : apaisé.

Hugh Masekela. © Elijah Star

Hugh Masekela. © Elijah Star

Publié le 29 mai 2010 Lecture : 2 minutes.

A l’instar de Miriam Makeba, qui fut son épouse de 1964 à 1966, le trompettiste et chanteur Hugh Masekela a résisté contre l’apartheid depuis l’étranger. En 1960, l’année du massacre de Sharpeville, il a quitté son pays pour partir s’installer aux États-Unis. Il y a gagné ses galons de vedette ­internationale, grâce à des succès phénoménaux comme Grazing in the Grass (1968, plus de 4 millions d’exemplaires vendus).

Dans les années 1970, j’ai senti que l’Afrique commençait sérieusement à me manquer. Comme je ne pouvais pas rentrer, je suis allé ailleurs », raconte Masekela. Il passe ainsi un an au Congo chez le chanteur Tabu Ley Rochereau, rencontre Franco, la star nationale, séjourne au Liberia, au Ghana, loge un temps chez Fela, le père de l’afrobeat, au Nigeria… De retour aux États-Unis à la fin des années 1980, il tourne avec Paul Simon, qui présente alors Graceland sur les scènes du monde. Gros succès, l’album permet au son sud-africain de faire son entrée en Occident.

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Après la libération de Mandela, en 1990, Masekela rentre à la maison. Le gaillard, qui a pas mal roulé sa bosse depuis sa naissance, le 4 avril 1939, à Witbank, dans l’est du Transvaal, non loin de Pretoria, veut maintenant se poser et prendre le temps de (bien) vivre. À Johannesburg, Brahugh (« Brother Hugh »), comme tout le monde l’appelle, reçoit dans les jardins d’un grand hôtel. À Paris, c’est dans les salons cosy de Mme l’ambassadrice d’Afrique du Sud. Quant à son nouvel album, qui mélange jazz, afrobeat, R’nB, sons et rythmes des townships, il lui a donné un titre en accord avec son état d’esprit du moment. « “Phola”, c’est un mot magique, commun à plusieurs langues chez nous – zoulou, sotho, etc. À quelques nuances près, il veut toujours dire “cool, relax”. Et je crois que mon disque est effectivement très calme. » Si certains titres évoquent la pollution (« Weather »), la faim et les conflits dans le monde (« Hunger »), ou dénoncent « les mensonges et les promesses non tenues des politiques, autosatisfaits, avides et menteurs », Brahugh se défend d’être un artiste engagé. « Il fut une époque où l’on était forcément partie prenante, car nous voulions libérer l’Afrique du Sud. C’est terminé. » Écrire des chansons, aujourd’hui, cela signifie surtout susciter des interrogations et partager ses préoccupations.

« Poison lent »

Il n’est pas si tranquille pour autant. En 2008, l’année où Phola est sorti en Afrique du Sud, il a monté à Pretoria un spectacle musical qui raconte cent ans de musique sud-africaine. Cette année, il s’est investi dans l’ouverture « d’une académie, une école des arts pluridisciplinaire où, par exemple, des musiciens de tout le continent pourront venir apprendre et, en échange, transmettre leur savoir ». Il cite Oumou Sangaré, Salif Keita et Papa Wemba. L’idée est belle…

En attendant, il assistera à la Coupe du monde de football devant sa télévision. « J’ai joué au foot autrefois. On m’avait surnommé “le poison lent” parce que je ralentissais beaucoup le jeu. Aujourd’hui tout cela ne m’intéresse plus vraiment. » L’événement aura-t-il un impact positif ? « Ce qui change un pays, c’est la manière dont on l’administre, pas un événement sportif. »

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