Ismaïl Omar Guelleh : « Le pays a encore besoin de moi »
Le chef de l’État djiboutien a décidé de jouer les prolongations à la faveur d’une révision de la Constitution lui permettant de se représenter. Il s’en explique dans un long entretien. Et parle aussi des relations de son pays avec la France, des « affaires » et d’une Corne de l’Afrique sous haute tension.
À 62 ans, le chef de l’État djiboutien, Ismaïl Omar Guelleh, est un homme ambitieux, qui caresse un rêve a priori impossible : faire de son pays un hub économique international, une sorte de Dubaï ou de Singapour de l’Afrique. Le défi est de taille. Coincée aux confins de cette Afrique orientale en proie à de multiples crises, entre l’Éthiopie, l’Érythrée et la Somalie, la République de Djibouti est une terre de paradoxes, plusieurs mondes en un seul. Cette sentinelle postée entre l’Afrique et le Moyen-Orient, qui fascina tant d’hommes, de poètes, d’aventuriers ou de chercheurs, balayée par les vents chauds venus d’Arabie ou d’Égypte, ne croule pas sous les ressources minières ou pétrolières, et manque d’eau et de moyens. Son relief et ses sols témoignent des humeurs souterraines de la Terre, la végétation y est rare, et l’activité des hommes soumise aux rayons brûlants du soleil et aux températures caniculaires.
Mais Djibouti, c’est aussi un État miniature qui attire les investisseurs, arabes et chinois essentiellement, comme le miel attire les abeilles. Un État garnison, qui abrite des bases française, américaine et bientôt japonaise, un havre de stabilité dans une Corne de l’Afrique toujours sous tension. Sa position géographique, exceptionnelle, entre mer Rouge et océan Indien, lui permet de tirer profit du développement exponentiel des échanges maritimes entre l’Asie, l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Europe. Les projets et les réalisations s’y multiplient, du terminal à conteneurs ultramoderne de Doraleh à la zone franche voisine, en passant par des marinas, un casino et des palaces cinq étoiles destinés à accueillir les hommes d’affaires du monde entier et les touristes en quête d’évasion.
Au pouvoir depuis 1999, réélu en 2005 pour, théoriquement, un dernier mandat, Ismaïl Omar Guelleh a décidé de jouer les prolongations. Le 19 avril dernier, le Parlement djiboutien a adopté une réforme de la Constitution lui permettant, entre autres dispositions, de se représenter en 2011. Il s’en explique dans l’entretien qui suit, réalisé à la fin du mois d’avril dans un salon du palais présidentiel. Et répond aussi aux questions qui dérangent : la quasi-absence d’opposition, les affaires Boreh et Borrel, les critiques émises sur les conditions d’organisation de la présidentielle de 2011 et les relations souvent compliquées avec l’ancienne puissance coloniale, jugée trop frileuse en termes d’investissements. Enfin, il analyse les conséquences et les leçons de la crise économique mondiale sur son pays, revient sur les tensions récurrentes avec son voisin érythréen, sur les pirates somaliens ou sur la Chine.
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Jeune Afrique : Dans une interview accordée à Jeune Afrique en février 2008, vous aviez déclaré ne pas vouloir vous « enliser dans la routine, les flatteries des courtisans, et ne pas être du genre à déchirer une Constitution parce qu’elle ne [vous] plaît pas ». À l’époque, vous excluiez de vous représenter en 2011. Le Parlement djiboutien a voté, le 19 avril, une réforme de la Constitution supprimant le verrou de la limitation du nombre de mandats et vous venez d’annoncer votre candidature… Pourquoi avez-vous changé d’avis ?
Ismaïl Omar Guelleh : Je me souviens très bien de cet entretien. À l’époque, j’étais réellement persuadé que deux mandats suffiraient et qu’il serait temps, ensuite, de passer la main. J’ai besoin de repos, de faire autre chose. Mais, depuis l’année dernière, je suis l’objet de pressions amicales qui, compte tenu du contexte régional pour le moins inquiétant, m’incitent à continuer. J’ai résisté, je vous l’assure, mais j’ai finalement consenti ce sacrifice. Parce que je peux vous assurer que mon métier n’est pas de tout repos…
L’absence de l’opposition au Parlement [elle a boycotté les législatives de 2008, NDLR] n’entame-t-elle pas la légitimité et la crédibilité de cette réforme constitutionnelle ?
Cinq partis sont représentés à l’Assemblée, qui appartiennent à la mouvance présidentielle. L’un d’eux, le Parti national démocratique (PND), a refusé de soutenir cette réforme et présentera même un candidat contre moi lors de la prochaine présidentielle. C’est bien la preuve que, même entre alliés, on peut exprimer des désaccords et faire valoir ses différences. En ce qui concerne l’opposition, elle est absente parce qu’elle en a voulu ainsi. Je le regrette mais je ne suis pas responsable de ses choix.
Manifestation de soutien, à Djibouti, le 19 avril, juste après la modification de la Constitution
qui autorise un troisième mandat présidentiel. (Simon Maiana/AFP)
Ce même 19 avril, le président malien, Amadou Toumani Touré, annonçait qu’il ne modifierait pas la Constitution pour pouvoir briguer un troisième mandat. Ne pensez-vous pas, comme de nombreux Africains, qu’il incarne un modèle de démocratie ?
Chacun sa façon de voir les choses. Les contextes sont différents et il faut aussi écouter ceux qui pensent que la limitation du nombre de mandats n’est pas forcément démocratique. Si votre population souhaite vous voir continuer à diriger le pays, parce que vous avez obtenu des résultats et qu’ils sont satisfaits de votre travail, pourquoi les en empêcher puisqu’il s’agira d’une élection ?
Vos adversaires vous répondront qu’étant au pouvoir et disposant de beaucoup plus de moyens que vos opposants, vous n’aurez aucun mal à vous faire élire, que le scrutin est arrangé d’avance…
Les élections sont supervisées par des observateurs internationaux, nombreux et qui sillonnent le pays. Si la population se mobilise contre moi, vous pensez sincèrement que personne ne s’en apercevra ? Soyons sérieux : il y aura une élection, qui se déroulera en toute transparence. Les Djiboutiens choisiront leur président, quel qu’il soit. Moi j’ai un pays à construire et une population à nourrir. Je veux être jugé sur mes résultats. C’est facile de critiquer, surtout quand on ne fait rien…
Depuis le décès d’Ahmed Dini, le boycott de la présidentielle de 2005 et des législatives de 2008, l’opposition peine à exister. N’est-ce pas gênant ?
C’est vrai. Tout pouvoir doit avoir son contre-pouvoir, toute nation peut tirer profit d’un véritable débat au sein de sa classe politique, pour peu qu’il soit constructif. Mais pour faire de la politique, il faut travailler, proposer, pas seulement critiquer. L’opposition a fait des choix, il faut qu’elle les assume.
Que pèse-t-elle réellement ?
Je n’en sais rien, mais à mon avis pas grand-chose… En tout cas pas suffisamment pour influer sur l’avenir de ce pays.
Djibouti a connu des événements tragiques au cours des années 1990, avec de graves affrontements ethniques entre Issas et Afars. Cela pourrait-il recommencer ?
Si nous ne faisons pas attention, si nous ne veillons pas à l’unité nationale, ce n’est pas à exclure.
Vous considérez-vous toujours comme un Issa ?
Non, je suis djiboutien.
Selon vous, la République de Djibouti est-elle une démocratie ?
Il n’y a chez nous ni peine capitale ni prisonniers politiques. Les journalistes ne vont pas en prison pour leurs écrits. On peut manifester, faire grève. Les élections se déroulent normalement. Oui, Djibouti est une démocratie.
Mais votre parti dirige le pays depuis plus de vingt ans…
Et alors ? L’alternance n’est ni une fin en soi ni un gage absolu de bonne gouvernance, que je sache.
Votre ancien conseiller financier, l’opposant et homme d’affaires Abdourahman Boreh, a déposé, le 24 février, une plainte à Paris contre vous pour assassinat et extorsion. Il dénonce des manœuvres de votre part destinées à l’empêcher de se présenter à la présidentielle prévue en 2011. Comment avez-vous réagi à ce nouvel épisode judiciaire en France ?
Ce monsieur fait partie de ceux qui, à l’ombre du pouvoir, se sont sentis pousser des ailes et ont éprouvé ensuite les pires difficultés à refréner leurs ambitions personnelles et leur « appétit ». Il s’est réfugié en France, a pris le même avocat que Mme Élisabeth Borrel et m’accuse, lui aussi, de tous les maux. Drôle de coïncidence, ne trouvez-vous pas ? L’affaire est devant la justice, il devra donc fournir les preuves de ce qu’il avance. Mais je crains que tout cela ne se retourne contre lui. Les grandes déclarations sont une chose, les faits et la vérité en sont une autre.
Il a annoncé son désir de se porter candidat contre vous lors de la prochaine présidentielle. Cela vous inquiète-t-il ?
Au contraire, qu’il le fasse. Il sera le bienvenu. Nous verrons bien ce qu’il représente.
Depuis les accords de paix de mai 2001 entre le gouvernement et le Front pour la restauration de l’unité et de la démocratie [Frud], la situation de la rébellion semble floue. Apparemment, certains irréductibles poursuivent le combat, de manière sporadique, certes, mais tout de même. Où en est-on ?
Dans le nord du pays, certains, qui ont participé aux négociations de 2001, ont signé l’accord et ont été incorporés dans l’armée, voire indemnisés. Ensuite, ils se sont dit qu’ils avaient là un filon potentiellement lucratif : faire la paix, reprendre les armes, renégocier pour obtenir de nouvelles indemnités, etc. Et comme ils ont l’oreille attentive de nos voisins érythréens qui ne ratent jamais une occasion de nous déstabiliser… Mais cela ne m’inquiète pas : les rébellions qui n’ont pas le soutien de la population n’ont aucune chance de durer.
Votre pays est très dépendant des investissements étrangers et du trafic maritime. Quel a été l’impact de la crise économique mondiale sur l’économie djiboutienne ?
La crise nous a frappés de plein fouet, comme tout le monde. Nous avons enregistré un net recul des investissements directs étrangers, un certain nombre de projets ont dû être différés en attendant des jours meilleurs. Pis, tout cela s’est conjugué à un renchérissement du coût de l’énergie et à la hausse du prix des denrées alimentaires. Grâce au soutien de nos frères saoudiens, émiratis, koweïtiens ou indiens, nous avons pu juguler cette crise et ces difficultés. Et nous continuons d’avancer. De nouveaux projets importants et structurants vont voir le jour : un chantier naval de 250 millions de dollars, deux nouvelles routes, dont une à quatre voies, un nouveau port à Tadjoura, qui sera relié par route au nord de l’Éthiopie, etc. C’est prépondérant pour nous, car cela permettra de développer cette région de Djibouti et d’endiguer l’exode des populations qui, faute de débouchés et d’infrastructures sur place, affluent en ville. En vérité, cette crise a été un mal pour un bien, car elle nous a contraints à mieux nous organiser et à trouver des solutions urgentes mais inventives, comme notre initiative pour le développement social, l’acquisition de terres en Éthiopie ou au Soudan pour produire nous-mêmes les céréales dont nous avons besoin, ou encore la mise en culture, ici à Djibouti, d’une variété japonaise de riz qui supporte très bien les concentrations importantes de sel et les fortes chaleurs. Le pire ennemi d’un dirigeant, c’est le confort et la routine.
Parmi vos principaux partenaires, Dubaï est certainement celui qui a le plus été touché. Avez-vous été inquiet quand l’émirat a frôlé la faillite ?
Évidemment, même si nous imaginions bien que les Émirats arabes unis ne laisseraient pas tomber Dubaï. C’est surtout Nakheel, la société qui opère dans le tourisme et l’immobilier, qui a été la plus touchée. DP World [activités portuaires, NDLR], moins. D’une certaine manière, cela a permis à Dubaï de mettre fin à certaines dérives, d’être moins prodigue et plus rationnel.
Qui est aujourd’hui votre principal partenaire extérieur ?
En volume, c’est incontestablement la Chine. Mais il s’agit essentiellement de prêts. Si l’on s’en tient à l’aide que peut nous fournir un pays, je citerais le Japon, qui se montre extrêmement généreux avec nous.
L’offensive économique chinoise sur le continent suscite un certain nombre de critiques, notamment de la part des Européens et des Américains, qui reprochent à Pékin, entre autres, de réendetter l’Afrique alors qu’eux ont procédé à d’importantes annulations de dettes. Inquiétudes légitimes ou faux procès ?
L’Afrique a plus que jamais besoin d’infrastructures. S’endetter pour mettre en place ce qui nous fait si cruellement défaut ne doit pas être un problème, au contraire. C’est la condition sine qua non de notre développement. La RD Congo pourrait produire de l’électricité pour l’ensemble du continent, mais il faut des barrages. Les Chinois, eux, prêtent l’argent nécessaire à la construction de ces infrastructures et les réalisent. Personne n’empêche les Occidentaux d’en faire autant, que je sache. Mais ils n’ont pas une vision à long terme, ils veulent des retours sur investissements démesurés et immédiats. J’ajoute que les Chinois, eux, ne fixent pas les prix de nos matières premières, contrairement aux Européens ou aux Américains… Alors certaines leçons de morale me font sourire.
Où en est le projet de pont au-dessus du Bab el-Mandeb, entre Djibouti et le Yémen ?
Ce projet fait partie de ceux qui ont été ajournés en raison de la crise. La famille Ben Laden est très intéressée. Les Chinois aussi. Mais ce pont n’aura d’intérêt que si l’Arabie saoudite s’associe au projet et si un réseau ferroviaire reliant le Moyen-Orient à l’Afrique est construit.
L’énergie est, avec l’eau, un des principaux soucis de Djibouti. Pensez-vous réellement que les alternatives aux hydrocarbures que sont le solaire, l’éolien ou la géothermie peuvent constituer des solutions ?
Je mise énormément sur la géothermie, dont le potentiel est immense chez nous. Certains projets sont très avancés. Là encore, nous bénéficions de l’aide de nos partenaires koweïtiens, islandais et chinois. Nous sommes également en train de finaliser la construction d’une usine à marée motrice et élaborons un projet éolien avec Alstom et Suez.
L’émergence de la piraterie moderne dans la Corne de l’Afrique constitue-t-elle une menace sérieuse pour Djibouti ?
C’est une évidence. Nous sommes redevenus un pays à risques uniquement à cause de ce fléau. Les pirates se postent à l’entrée du golfe d’Aden et menacent potentiellement tous les types de cargaisons qui transitent par Djibouti, Djeddah et le canal de Suez. Les polices d’assurance s’envolent, ce qui finit de décourager certains armateurs. Et malgré tous les dispositifs mis en place par les Européens, les Américains ou les Japonais, les pirates somaliens sont toujours là. Je dirais même qu’ils sont de plus en plus forts.
Comment expliquez-vous cela ?
Depuis que la piraterie existe, elle n’a jamais été vaincue en mer. Le cœur du problème est à terre. Et les Occidentaux se refusent à poser un pied en Somalie, là où sont réfugiés ces pirates, dans une zone relativement restreinte allant du Puntland au nord de Mogadiscio. Actuellement, nous dépensons des milliards de dollars pour rien, ou presque.
Arrestation de pirates dans l’océan Indien, en 2009, par des soldats portugais. (NATO/Reuters)
Que faut-il faire, selon vous ?
Je vous l’ai dit : agir en Somalie, mettre fin au chaos qui y règne, restaurer l’autorité de l’État, rétablir l’ordre, former et équiper des forces de sécurité somaliennes, empêcher la population de rejoindre les rangs des pirates. Je ne dis pas que c’est simple, mais il faudra bien commencer un jour. Tant que la paix et la sécurité ne seront pas assurées dans ce pays, rien ne changera.
Depuis avril 2008, une partie de votre territoire, la zone frontalière de Ras-Doumeira, est occupée par l’Érythrée. L’ONU a adopté plusieurs résolutions condamnant votre voisin, exigé le retrait des troupes, fixé un ultimatum, dépassé depuis plus d’un an, et rien ne se passe…
Surprenant, non ? Les sanctions adoptées par l’ONU commencent cependant à produire leurs effets. Le président érythréen, Issayas Afewerki, multiplie les déplacements en quête de soutiens, au Qatar, en Arabie saoudite et en Libye, notamment. Il envoie des messages un peu partout pour faire pression sur nous. Mais nous maintenons nos exigences : le retrait de ses troupes et la libération de nos prisonniers.
Connaissez-vous personnellement Issayas Afewerki ?
Bien sûr. Je lui avais téléphoné en avril 2008, le soir même de l’incursion des troupes érythréennes. Comme à son habitude, il a tenté de me faire croire que mes informations étaient fausses et qu’aucun soldat de son armée n’était chez nous. J’y suis donc allé et j’ai vu une armée… en civil !
Ce conflit pourrait-il dégénérer ?
Aucune des deux parties n’y a intérêt. L’Érythrée encore moins que nous. Son armée n’est plus que l’ombre de ce qu’elle a été tant les désertions se multiplient. L’Éthiopie, de son côté, accentue sa pression sur Asmara. Mais Afewerki est ainsi : il se plaît bien dans la situation actuelle, sans gouvernement, sans Parlement, sans partis politiques. Il fait ce que bon lui semble, ne reconnaît rien ni personne. Que voulez-vous faire face à une telle personnalité ?
Croyez-vous aux États-Unis d’Afrique ?
Non, pas à court ou à moyen terme en tout cas. C’est le fantasme de M. Kadhafi. Nous peinons déjà à mettre en place un marché commun ou à faire fonctionner nos institutions régionales et continentales, alors…
Vos relations avec la France alternent entre coups de froid et réchauffements…
Ce n’est pas propre à Djibouti. Il en va de même pour beaucoup de pays africains, du Sénégal à l’Algérie, en passant par la Côte d’Ivoire, le Rwanda…
L’affaire du juge Borrel a tout de même longtemps empoisonné vos rapports avec l’ancienne puissance coloniale. La relaxe, en mai 2009, par la cour d’appel de Versailles de deux responsables djiboutiens [Djama Souleiman et Hassan Saïd, jugés pour subornation de témoins dans l’enquête sur l’assassinat du juge en 1995, NDLR] et la levée des mandats d’arrêt internationaux qui les visaient ont-elles mis fin aux tensions entre la France et vous ?
Quand le président Sarkozy est venu à Djibouti en janvier dernier, il m’a assuré que cette histoire appartenait au passé. Nous sommes actuellement en train de négocier un nouvel accord de défense et souhaitons tourner la page de la Françafrique pour un véritable partenariat avec Paris. Nous avons des affinités historiques, culturelles et linguistiques. Mais nous sommes obligés de constater que la coopération de la France se réduit comme peau de chagrin. La France peut beaucoup nous apporter en termes de formation universitaire, scientifique ou militaire, par exemple. Mais aujourd’hui, nos étudiants vont de plus en plus au Maroc ou en Tunisie, et de moins en moins dans l’Hexagone. Les conseillers techniques de la Françafrique, c’est fini. Mais personne ne les a remplacés.
Nicolas Sarkozy reçu par Ismaïl Omar Guelleh en janvier à Djibouti. (Gérard Cerles/AFP)
Connaîtra-t-on un jour la vérité sur cette affaire Borrel ?
Je l’espère. Les Français ont été manipulés par quelques juges. Dans quel pays la justice s’assoit-elle ainsi sur une affaire pendant quinze ans ? Soit le dossier est classé, soit il est transmis pour qu’il y ait un jugement. Deux Djiboutiens racontent n’importe quoi, on m’accuse sans la moindre preuve, des juges penchent pour une thèse, d’autres pour une autre, dans un contexte où les magistrats n’osent pas mettre en cause certains de leurs confrères par solidarité… Mais nous, nous sommes sereins. Quelles raisons avions-nous de faire assassiner un conseiller du ministre de la Justice de Djibouti ?
Il se murmure que les Français veulent obtenir une baisse du loyer de leur base militaire installée à Djibouti…
L’accord ne comporte pas de volet financier, puisque le loyer de la base est fixé jusqu’en 2012. Et franchement, je ne pense pas que 30 millions d’euros par an ce soit cher payé…
Les États-Unis paient moins, eux…
Oui, 30 millions de dollars. Mais ils investissent beaucoup plus. Il suffit d’aller à l’aéroport pour voir les multiples infrastructures qu’ils ont mises en place.
Comment qualifieriez-vous votre relation avec Nicolas Sarkozy ?
Entre nous, le courant passe très bien. Même si je ne vais pas à la même vitesse que lui [rires].
Propos recueillis à Djibouti par Marwane Ben Yahmed
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