Parlement : 2012, c’est déjà demain
À deux ans du scrutin, la classe politique semble obsédée par l’obtention d’un mandat législatif.
Algérie : Bouteflika III, acte I
On ne peut qualifier la vie parlementaire algérienne de palpitante. La révision de la Constitution, en novembre 2008, a été adoptée sans débat. Pas la moindre commission d’enquête après la mise en examen, le 13 janvier 2010, du PDG de Sonatrach, et si l’assassinat du colonel Ali Tounsi, patron de la police, un mois plus tard, a réellement ému les élus du peuple, il n’a pas suscité leur curiosité. Quant à leur absentéisme chronique, il transforme les séances de questions orales au gouvernement en affligeant spectacle : un hémicycle aux trois quarts vide où les ministres sont, parfois, plus nombreux que les députés censés les interpeller.
L’actuelle législature – qui a bien mal commencé avec une abstention record aux législatives de mai 2007, où seul un électeur sur trois s’est rendu aux urnes – a connu une nouvelle bizarrerie avec l’adoption, en juillet 2009, d’une loi de finances complémentaire introduisant des orientations économiques à l’exact opposé de celles que députés et sénateurs avaient applaudies quelques mois plus tôt. Saïd Sadi, chef du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD, opposition laïque) dirait qu’elle « est dans le coma ». Contestée de l’intérieur (des élus de l’opposition demandent sa dissolution), décriée par les médias, l’Assemblée populaire nationale (APN) ne passionne pas l’opinion, mais elle attise les ambitions.
Se faire élire député est, dit-on, le meilleur moyen de prendre l’ascenseur social. Un salaire mensuel équivalant à vingt fois le salaire national minimum garanti, soit près de 300 000 dinars (2 970 euros), séjours dans les palaces algérois payés par le contribuable et une litanie de privilèges sans contrepartie véritablement productive. Autant de raisons qui font que toute la classe politique est obsédée par l’obtention d’un mandat aux législatives de 2012.
Du monde sur les rangs
La chose n’est pas si aisée. Les réunions devant aboutir à l’investiture des candidats à la députation s’achèvent, le plus souvent, en foire d’empoigne, tant au sein des partis de la majorité que de ceux de l’opposition. Les barons en place font de la résistance et veulent se faire réélire. Si la direction n’est pas d’accord, ils claquent la porte du parti et se présentent en indépendants.
Les sanafirs (« schtroumpfs »), sobriquet désignant les petits partis, sont en quête de personnalités charismatiques dont la notoriété locale pourrait leur faire gagner des sièges au sein de la représentation nationale. L’intérêt ? Le montant des subventions de l’État aux partis politiques est proportionnel à leur nombre d’élus au Parlement. En outre, les députés sont censés reverser le tiers de leurs émoluments à leur parti.
Cette fièvre électorale, en avance de deux ans, a atteint le Front de libération nationale (FLN, première force politique) au sortir de son 9e congrès, tenu à Alger le 19 mars. Ces assises ont renouvelé la confiance au secrétaire général sortant, l’ancien Premier ministre Abdelaziz Belkhadem, et désigné les 151 membres du comité central. Un mois plus tard, les membres du Bureau politique ne sont pas encore choisis, mais tous les esprits sont déjà tournés vers 2012.
Ambiance identique au sein des autres formations de l’Alliance présidentielle, le Rassemblement national démocratique (RND), du Premier ministre Ahmed Ouyahia, et les Frères musulmans du Mouvement de la société pour la paix (MSP). L’opposition fourbit, elle aussi, ses armes. La trotskiste Louisa Hanoune passe en revue ses troupes à l’intérieur du pays, les islamistes d’El-Islah et ceux d’En-Nahda tentent de se réorganiser. En Algérie, 2012, c’est déjà demain.
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