Parlons chiffons

Fawzia Zouria

Publié le 18 avril 2010 Lecture : 2 minutes.

En France, la commission parlementaire sur le voile se dirige vers une loi interdisant le voile intégral (burqa et niqab) dans la plupart des services publics, voire dans les services privés et dans la rue… Mais elle accorde aux « sœurs » le droit de se couvrir chez elles. Vous étiez sur le point de vous exclamer : « Encore heureux ! » Non, justement. La commission fait preuve­ d’une méconnaissance édifiante des pratiques de l’islam. Selon la religion de Mohammed, le voile est fait pour sortir et certes pas pour rentrer chez soi. Il est un signe de pudeur destiné à se dérober au regard étranger, que cet étranger vous frôle dans la rue ou dans un autobus, qu’il vous croise dans une boutique ou vous reçoive derrière un guichet. En revanche, une fois chez soi, on tombe automatiquement le camouflage. Le contraire passerait pour une hérésie. Voilà donc ce qu’on appelle un raisonnement français tiré par les cheveux.

Quant aux Belges, ils ont déjà décidé de l’interdire partout, sauf dans… les bals masqués. Cette façon de confondre les genres et de faire un rapprochement entre l’austère costume des musulmanes et les fêtes de déguisement laïques fleure bon l’humour belge. Saviez-vous, en l’occurrence, que s’il y a un lieu où il est permis aux voilées de se découvrir le visage, c’est l’Arabie saoudite lors du pèlerinage ? Que les « sœurs » se couvrent à Bruxelles et se découvrent à La Mecque, voilà le comble du paradoxe.

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Au début de mars, les journaux anglais se sont moqués de notre Carla Bruni-Sarkozy parce qu’elle ne portait pas de soutien-gorge sous sa robe lors du dîner offert par l’Élysée au président russe, Dmitri Medvedev. Aux yeux des sujets de Sa Gracieuse Majesté, un tel mépris pour le soutif est un signe de légèreté, voire d’immoralité. À coup sûr, ils n’ont rien lu des consignes islamistes. Pour les barbus purs et durs, les femmes doivent renoncer au soutien-gorge à tout prix, car c’est une invention occidentale « diabolique ». Les seins libres sous l’abaya, voilà ce qui est de l’ordre de la vertu et mène plus rapidement au paradis. Comme quoi, Carla a agi en bonne musulmane sans le savoir, appliquant à la lettre le comportement prôné par les salafistes. Et dire qu’aucun de ces derniers n’a eu la délicatesse de la remercier…

Dans le film La Journée de la jupe, Isabelle Adjani, superbe dans le rôle d’une institutrice désespérée par le comportement de ses élèves de la « zone », machos pour la plupart, propose de lancer une Journée de la jupe. Assez du pantalon, cet habit que les grands frères imposent à leurs petites sœurs – à moins qu’elles n’y recourent volontairement – afin de ne pas provoquer de raffut dans la cité ni exciter le mâle ! La journaliste soudanaise Loubna Ahmed al-Hussein a défrayé la chronique l’année dernière en optant, elle, pour le pantalon. Au risque de recevoir des coups de fouet.

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