Cannes : l’Afrique de retour !
Le Tchadien Mahamat-Saleh Haroun concourra pour la Palme d’or avec « Un homme qui crie ». Le Franco-Algérien Rachid Bouchareb avec « Hors-la-Loi ».
Ce n’était plus arrivé depuis 1997 ! Après treize années d’absence, l’Afrique fait son grand retour à Cannes. Du 12 au 23 mai, le festival accueillera enfin de nouveau le septième art africain dans sa sélection phare, celle des films en compétition pour la Palme d’or. Il devrait par ailleurs être fort bien représenté sur la Croisette autant dans le in que dans le off lors de cette édition 2010. Ainsi va prendre fin une trop longue période pendant laquelle on avait pu croire que les responsables du festival négligeaient, voire boycottaient, les productions au nord et surtout au sud du Sahara.
Mais le plus étonnant est peut-être l’identité du pays subsaharien qui aura l’honneur de représenter le continent sur les célèbres marches du Palais des festivals. Car il n’est pas, loin de là, l’un des plus puissants ni des plus renommés en matière de cinéma. Le Tchad, en effet, dépourvu de salles depuis des années, n’accorde aucune attention particulière à ses créateurs. Mais il lui suffit de disposer avec Mahamat-Saleh Haroun d’un unique réalisateur d’envergure internationale – déjà récompensé notamment à la Mostra de Venise – pour réussir cette performance. Le film sélectionné, Un homme qui crie, doit son titre à ce vers du Cahier d’un retour au pays natal, d’Aimé Césaire : « Un homme qui crie n’est pas un ours qui danse. » Drame familial, dont les deux héros principaux sont un père et son fils confrontés au rachat, par des Chinois, du palace qui les employait, ce film a sans surprise pour toile de fond la guerre civile interminable qui atteint régulièrement la capitale, N’Djamena.
Un Sud-Africain dans la section Un certain regard
En compétition également, Hors-la-Loi, la suite très attendue d’Indigènes, du Franco-Algérien Rachid Bouchareb. Il ne s’agit plus cette fois de la Seconde Guerre mondiale mais de la guerre contre le colonialisme. Débutant en 1945 à Sétif, lors des manifestations nationalistes qui furent suivies de massacres de masse de la population par les autorités françaises et des milices de colons, Hors-la-Loi se termine en 1962 avec la victoire du FLN conduisant à l’indépendance. Ce long-métrage au budget important financé avec l’aide d’Alger se passe pour l’essentiel dans l’Hexagone. Ses acteurs principaux, à l’exception de Samy Naceri, empêché de jouer en raison d’ennuis judiciaires, seront comme dans Indigènes Jamel Debbouze, Roschdy Zem et Sami Bouajila (récompensés en 2006 du prix d’interprétation masculine à Cannes), qui interprètent trois frères militant pour la libération de leur pays natal tout en pratiquant le gangstérisme. Hors-la-Loi, évidemment, devrait susciter moins de polémiques en Algérie qu’un autre film en compétition, 100 % français, Des hommes et des dieux, de Xavier Beauvois, dont le sujet est pour le moins délicat : une version toute personnelle de l’assassinat des sept moines du monastère de Tibéhirine pendant la guerre civile.
Toujours en sélection officielle, mais dans la section Un certain regard, le Sud-Africain Oliver Schmitz, autrefois pionnier de la lutte antiapartheid sur grand écran, présentera Life Above All (La Vie avant tout). Une adaptation d’un roman à succès du Canadien Allan Stratton tournée au pays de Nelson Mandela. Il devrait être rejoint sur la Croisette par d’autres réalisateurs du continent remarqués par les sélectionneurs, même s’ils ne viendront pas concourir pour la Palme d’or. En plus de Benda Bilili !, on annonce dans les deux principales sections « parallèles » – la Quinzaine des réalisateurs et la Semaine de la critique – plusieurs films du Maghreb et d’Afrique subsaharienne, dont les titres ne seront dévoilés que dans quelques jours.
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