Timide renouveau du documentaire africain
Plusieurs films présentés lors du festival Cinéma du réel ainsi que la sortie de « La Chine est encore loin », de l’Algérien Malek Bensmaïl, attestent d’une nouvelle vitalité du genre sur le continent.
Qui sont ces « dames en attente » qui donnent leur titre à un poignant court-métrage des Congolais Dieudo Hamadi et Divita Wa Lusala ? Femmes de fonctionnaires non payés ou de chômeurs, elles viennent d’accoucher à la maternité de Kitambo, à Kinshasa. Et on leur interdit de quitter l’établissement tant qu’elles n’auront pas payé la clinique. Désargentées, elles ne pourront partir avec leur nouveau-né qu’en laissant en gage des objets d’une valeur équivalente au montant de la dette.
Pour parler de ces femmes en détresse et du personnel de la maternité, qui ont accepté d’être filmés sans fard par leur caméra numérique, les deux réalisateurs, bien qu’invités très officiellement par les organisateurs du festival de documentaires Cinéma du réel, n’ont pu venir fin mars au Centre Pompidou à Paris. Refus de visa pour ces jeunes célibataires, suspects a priori, aux yeux de l’administration française, de chercher à émigrer illégalement…
Ce qui résonne, hélas, avec le sujet d’Atlantiques (mention spéciale du prix Culturesfrance), de Mati Diop, une jeune réalisatrice d’origine sénégalaise qui a de qui tenir puisqu’elle fait partie de la famille du célèbre et talentueux Djibril Diop Mambety. Mati Diop raconte en effet, dans un court-métrage d’une facture remarquable tant au niveau des images que du montage, l’histoire d’un jeune boat people de Dakar. Ce dernier a perdu la vie, noyé, en tentant de rejoindre l’Europe.
De bon augure
Ces deux films, tout comme le très poétique Collier et la Perle du Sénégalais Mamadou Sellou Diallo, témoignent de la nouvelle vitalité du documentaire africain. Leur présence remarquée dans la catégorie « Premier film » semble de bon augure pour confirmer la montée en régime d’un genre que les grands festivals africains comme le Fespaco ne considèrent comme majeur que depuis peu. Mais celle-ci ne pouvait masquer l’absence de documentaire africain dans la catégorie internationale, consacrée aux auteurs plus confirmés.
Quelques documentaristes subsahariens – comme le Camerounais Jean-Marie Teno ou le regretté Samba Félix Ndiaye, mort à la fin de 2009 – et surtout du Maghreb ont réussi à s’imposer sur grand écran ces dernières années. L’Algérien Malek Bensmaïl le prouvera encore, fin avril, avec la sortie en salles en France de son remarquable La Chine est encore loin. Un documentaire qui, malgré ce qu’indique son titre (extrait d’un verset du Coran), évoque la vie quotidienne d’une classe d’écoliers et de leur instituteur non pas en Asie, mais dans un village des Aurès où fut perpétré l’attentat-symbole qui marqua le début de la guerre d’Algérie. Une chronique pleine de vie et peuplée de beaux personnages qui se veut également une interrogation aussi subtile que salutaire sur les problèmes identitaires de l’Algérie contemporaine.
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