L’apartheid n’a pas d’avenir, et Israël le sait

Secrétaire général de l’Initiative nationale palestinienne et membre du Conseil législatif palestinien

Publié le 12 avril 2010 Lecture : 3 minutes.

Les dirigeants israéliens sentent de plus en plus le vent tourner. Disons qu’au moins ils admettent la réalité, à défaut d’en préparer les conséquences. En 2007, Ehoud Olmert avait déclaré : « Si un jour la solution de deux États est abandonnée et que nous nous retrouvons dans une situation à la sud-africaine, où les Palestiniens se battent pour obtenir l’égalité des droits, y compris en Cisjordanie et à Gaza, c’en sera fini d’Israël. » Plus récemment, Ehoud Barak a dit : « S’il n’y a qu’une seule entité, nommée ­Israël, entre le Jourdain et la Méditerranée, elle finira soit non juive, soit non démocratique… Si les Palestiniens peuvent voter, ce sera un État binational, sinon, ce sera un État d’apartheid. »

À partir de quand les « si » de MM. Olmert et Barak ne refléteront-ils plus une hypothèse mais la réalité ? Car l’apartheid est déjà là. En Cisjordanie, une partie des lois israéliennes s’applique aux Palestiniens, une autre aux Juifs. Les colons vivent illégalement dans de belles maisons subventionnées, tandis que nous sommes relégués dans des bantoustans de plus en plus petits.

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Je crois toujours, aujourd’hui, à la solution de deux États. Mais chaque jour qui passe confirme l’acharnement d’Israël à empêcher que cette solution ne voie le jour. Et il est grand temps de dire à Obama qu’elle est en train d’être réduite à néant sous ses yeux. Dans ce conflit interminable, l’incapacité de Washington à agir de manière déterminante est un point décisif. Les contribuables américains continuent d’alimenter les coffres-forts israéliens à coups de milliards de dollars. Et les États-Unis usent toujours de leur poids diplomatique pour protéger Israël de la censure mondiale.

J’ai de bonnes raisons de croire que les intentions de cette administration sont meilleures que celles de la précédente, mais il semble que lorsqu’il s’agit de la liberté des Palestiniens ce ne soit jamais le bon moment. Les présidents et les membres du Congrès qui appellent à la limitation de la colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem-­Est rencontreront toujours des résistances. Qu’elles viennent de l’American Israel Public Affairs Committee (Aipac), de la Zionist Organisation of America, ou du pasteur John Hagee et de la droite chrétienne.

George Mitchell, l’envoyé spécial d’Obama, s’est rendu dans la région pour convaincre les Israéliens de geler la colonisation. Ils ont refusé, et les États-Unis se sont inclinés. Après la conférence de l’Aipac à Washington fin mars, les Américains pourraient s’aplatir à nouveau. Un second aveu d’impuissance de Washington sur les colonies enverrait le message suivant aux Palestiniens : l’administration Obama ne souhaite pas vraiment qu’Israël­ renonce au sabotage des pourparlers de paix et de la solution de deux États.

Les leaders les plus responsables de notre région le répètent, mais personne ne les écoute : autoriser Israël à fouler aux pieds nos droits aura des conséquences. Mes collègues et moi, anticipant ces dangers, avons choisi l’action non violente contre l’occupation et le système d’apartheid pour en souligner l’injustice. Et prouver aux Israéliens et aux Juifs américains que ce n’est pas à eux que nous nous opposons mais à la politique actuelle de l’État hébreu.

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Nous sommes au début de la campagne Boycott, dés-investissement et sanctions (BDS) dirigée contre le gouvernement israélien parce qu’il refuse de se conformer au droit international. Toutefois, tant que les étudiants ne la feront pas leur, nos succès resteront marginaux.

Mais l’heure de l’engagement estudiantin approche. Je me suis exprimé dans de nombreuses universités américaines et européennes et j’ai pu constater combien mon auditoire avait changé en vingt ans. Ces jeunes gens, y compris des militants juifs progressistes, savent bien qu’il ne s’agit pas d’un conflit entre Arabes et Juifs mais entre une conception universelle de la liberté et des notions arriérées de suprématie raciale et de colonisation. Cet auditoire est en passe d’intégrer la campagne BDS parce qu’il a compris que ses dirigeants, à de rares exceptions près, ne veulent pas remettre en question l’assujettissement des Palestiniens à Israël.

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Les dirigeants américains seront peut-être les derniers à rejoindre notre lutte – pour un État palestinien réellement souverain aux côtés d’Israël ou pour un seul État offrant les mêmes droits à tous –, mais l’équation est en train de changer, et soutenir systématiquement Israël n’est plus un bon calcul. La légitimité morale de notre cause est bien trop forte.

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