Les nouveaux riches perdent la tête

Les pays de l’ex-Tiers Monde engloutissent des sommes énormes dans l’achat d’avions de combat, navires de guerre et autres coûteux engins de mort.

De 2005 à 2009, le commerce des armes a progressé de 22 % dans le monde. © Glez pour J.A.

De 2005 à 2009, le commerce des armes a progressé de 22 % dans le monde. © Glez pour J.A.

Publié le 2 avril 2010 Lecture : 2 minutes.

Attention, l’ex-Tiers Monde est en train de constituer des stocks d’armements dangereux pour la paix mondiale ! C’est le cri d’alarme lancé, le 15 mars, par le Stockholm International Peace Research Institute (Sipri). Pour donner à sa dénonciation une portée planétaire, cet organisme indépendant a décidé d’aller au-delà de la simple publication de rapports périodiques et de mettre en ligne sur le web sa base de données. Les internautes ont donc désormais accès – facilement et gratuitement – à toutes les informations concernant le commerce international des armes, dans près de deux cents pays.

Les achats s’étalant sur plusieurs années, le Sipri dresse un bilan sur une période de cinq ans et sur la base de 1 dollar constant (1990), ce qui neutralise les variations de prix et de taux de change. Son rapport du 15 mars révèle que le total des transactions a atteint 116 milliards de dollars de 2005 à 2009, contre 96 milliards au cours des cinq années précédentes (+ 22 %). Les principaux vendeurs sont toujours les mêmes : États-Unis (35 milliards, +17 %), Russie (27 milliards, 0 %), Allemagne (12 milliards, + 100 %), France (9,2 milliards + 30 %) et Royaume-Uni (5 milliards, – 11 %).

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Mais l’évolution la plus inquiétante concerne les acheteurs. Selon Paul Holton, directeur du Sipri, « les pays riches en ressources naturelles ont fait l’acquisition d’une quantité considérable d’avions de combat et de navires de guerre ». Du coup, « leurs voisins et rivaux passent des commandes similaires ». Ainsi, malgré la crise qui la secoue, la Grèce n’a cessé de s’équiper au rythme de 1 milliard de dollars par an. Pays pacifique par excellence, Singapour a plus que doublé ses achats d’armements (+ 146 %), pour devenir le 7e importateur mondial, derrière la Chine, l’Inde, la Corée du Sud, les Émirats arabes unis, la Grèce et Israël. La Malaisie, sa voisine, a pour sa part multiplié par huit la valeur de ses achats, tandis que l’Indonésie, le Pakistan et l’Azerbaïdjan ne sont pas en reste. « La vague d’acquisition en cours risque de déstabiliser toute la région », estime Holton.

L’Algérie dans le top 10

Le commentaire vaut également pour les pays latino-américains (qui ont accru leurs importations militaires de 150 %) et les pays arabes. Après Abou Dhabi (+ 152 %), l’Algérie entre à son tour, et pour la première fois, dans le Top 10 des acheteurs (9e) : la valeur de ses acquisitions (3,4 milliards) a doublé. D’autres pays arabes enregistrent des progressions encore plus fortes. C’est le cas du Qatar : + 548 % (285 millions en 2009) ; de la Syrie : + 356 % (543 millions) ; et d’Oman : + 133 % (607 millions).

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La part de l’Afrique dans le commerce mondial des armements ne dépasse pas 7 % (trois fois plus, quand même, que pour les autres types de marchandises). C’est en Afrique du Sud que la progression est la plus forte, en raison des mesures de sécurité exceptionnelles prises à l’occasion de la Coupe du monde de football (en juin-juillet prochains). La valeur de ses importations d’armements avoisine 2,2 milliards pour la période 2005-2009 (+ 4 600 %, record absolu). Mais d’autres pays africains achètent eux aussi à tour de bras : le Tchad (+ 826 %), la Guinée équatoriale (+ 426 %), le Mali (+ 328 %), la Namibie (+ 258 %), le Nigeria (+ 161 %)… « Ces dépenses sont-elles judicieuses dans des régions où la pauvreté est très élevée ? » s’interroge Holton. Bonne question, non ? 

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