Lettre ouverte à Nicolas Sarkozy

Seize anciens ambassadeurs de France* lancent un appel au président de la République française pour qu’il prenne la tête d’une initiative en faveur d’un règlement du conflit israélo-palestinien conforme au droit international et à l’équité.

Colonie israélienne de Har Homa, à Jérusalem-Est, en novembre 2006. © J.C. Coutausse/Fedephoto

Colonie israélienne de Har Homa, à Jérusalem-Est, en novembre 2006. © J.C. Coutausse/Fedephoto

Publié le 30 mars 2010 Lecture : 3 minutes.

Permettez à des serviteurs de l’État qui ont achevé leur mission publique, mais qui ont gardé leur ambition pour la France, de vous exprimer leurs préoccupations et leurs suggestions dans un domaine capital de la vie internationale : le conflit israélo-palestinien. Il leur semble que dans la conjoncture actuelle une initiative s’impose.

Bien que ce conflit ne soit plus, à ce jour, dans une phase violente, il demeure au cœur de l’avenir du Proche-Orient et affecte l’ensemble du monde arabo-musulman. Or l’impasse politique de ce conflit est totale. Jamais le gouvernement israélien, pressé par ses colons, n’a été aussi intransigeant, jamais la représentation palestinienne divisée n’a été aussi faible. Cependant, les chances de la paix sont réelles : modération du côté palestinien (le Hamas se fortifie jusqu’à présent de l’échec de toute négociation bilatérale) et offre arabe de reconnaissance pleine et entière d’Israël si l’État palestinien est créé selon une équité historique avec Israël et dans le cadre du droit international (frontières de la ligne verte de 1967 – sauf échange de territoires mutuellement agréé –, partage de Jérusalem avec garantie d’accès aux lieux saints et solution au problème des réfugiés palestiniens).

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Ces principes d’une solution, depuis longtemps identifiés, ont été réaffirmés de façon éclatante par l’Union européenne, le 11 décembre à Bruxelles. Fait exceptionnel : un accord est intervenu entre les vingt-sept États membres pour rappeler à Israël ses devoirs à l’égard de la communauté internationale et les graves conséquences d’une situation qui perdure depuis plus de quarante années d’occupation (le mur, les colonies, les spoliations, l’accaparement de Jérusalem). Il est en particulier urgent de mettre un terme à l’enfermement dans la bande de Gaza d’une population de 1,5 million de personnes en violation du droit humanitaire international, situation à laquelle il serait possible de remédier par l’envoi de Casques bleus aux accès à ce territoire.

Que faire maintenant pour ancrer dans la réalité diplomatique et sur le terrain ce qui reste une pétition de principe ? Le recours à une résolution contraignante du Conseil de sécurité de l’ONU paraît nécessaire. Cette résolution tracerait le cadre et les objectifs de l’ultime négociation à mener entre les parties sous le contrôle d’une conférence internationale qui veillerait à la mise en œuvre dans des délais déterminés de l’accord à intervenir et des garanties nécessaires. Le quartet (ONU, États-Unis, Europe, Russie) devrait jouer un rôle majeur dans le suivi de cette prescription internationale. Qui serait le mieux placé pour présenter une telle résolution d’inspiration européenne sinon la France, membre permanent du Conseil de sécurité et dont la politique au Proche-Orient a toujours visé à assurer la sécurité d’Israël et la reconnaissance des droits du peuple palestinien ? Une telle initiative serait conforme à la ligne suivie par les présidents successifs de la Ve République et qui vous a inspiré, monsieur le Président, dans vos discours courageux à la Knesset et en Algérie. Elle viendrait en appui à la novation esquissée par le président Obama dans son discours du Caire et remettrait notre pays à sa place traditionnelle dans la défense du droit et de la paix.

Les incertitudes qui pèsent sur une région essentielle pour la paix mondiale avec les menaces de recours à la force brutale ou de la montée des extrémismes dans cette partie du monde où le péril est contagieux, les souffrances d’une population délaissée… tout marque l’urgence et l’opportunité de revenir au droit international, qui seul peut fonder la paix et un ordre durable.

Monsieur le Président, vous qui avez une si haute idée de la mission de notre pays et de l’éthique qui l’inspire, ne tardez pas. Incitez la communauté internationale, responsable de nos destins communs, à trancher ce nœud gordien. Donnez enfin aux ­Israéliens et aux Palestiniens les conditions d’une vie pacifique à laquelle ils aspirent pour aujourd’hui et pour demain.

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*René Ala, Jacques Andréani, Denis Bauchard, Pierre-Louis Blanc, Louis Dauge, Yves Aubin de la Messuzière, Jacques-Alain de Sédouy, Bertrand Dufourcq, Christian Graeff, Stéphane Hessel, Pierre Hunt, Pierre Lafrance, Philippe Louet, Jean-Louis Lucet, Gabriel Robin, Henri Servant.

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