Blonde explosive
Colleen LaRose était une Américaine ordinaire, pas très heureuse dans la vie. Comment est-elle devenue « Djihad Jane » ? L’Amérique s’interroge. Avec effroi.
Que des femmes puissent être impliquées dans des opérations terroristes ne surprend plus personne. Depuis plusieurs années, l’Amérique s’est habituée aux images de combattantes bardées d’explosifs, en Irak, à Gaza ou ailleurs. Mais elle ne les avait pas nourries en son sein ! Or la blonde aux yeux couleur lagon arrêtée au mois de mars pour complot à visée terroriste est bel et bien l’archétype de l’Américaine moyenne. Pas franchement rassurant.
Colleen LaRose, 46 ans, vit dans la banlieue de Philadelphie. Elle entendait se servir de son physique digne d’une héroïne de la série Dallas pour « passer inaperçue » en Europe afin de mener à bien une mission : tuer un ressortissant suédois – vraisemblablement Lars Vilks, un caricaturiste qui, en 2007, avait dessiné le prophète Mohammed avec un corps de chien. Elle est également accusée, de concert avec cinq islamistes radicaux installés aux États-Unis, en Europe et en Asie, d’avoir recruté des djihadistes, hommes et femmes, sur internet, où elle se faisait appeler « Djihad Jane ». Tout un programme. Pour faire bonne mesure, elle envisageait d’épouser un combattant islamiste originaire d’Asie du Sud.
Brûler en enfer
Si l’affaire choque autant l’Amérique, analyse Mathieu Guidère, auteur du Manuel de recrutement d’Al-Qaïda, c’est parce qu’elle « brise le mythe d’un profil type du recruteur islamiste ». Pour autant qu’on le sache, aucune Occidentale avant « Djihad Jane » n’avait jamais joué ce rôle.
L’inculpation de LaRose a précédé de peu l’arrestation, en Suède, le 9 mars, d’une autre Américaine, Jamie Paulin-Ramirez, 31 ans, une jeune maman sans histoires, assistante médicale de son état. Relâchée sans qu’aucune charge ait été retenue contre elle, « Djihad Jamie », comme l’a aussitôt surnommée la presse, apprenait à son fils de 6 ans à « haïr les chrétiens », appelés, selon elle, à « brûler en enfer ». Elle aurait déclaré vouloir « s’attacher à une bombe, pour la cause ».
Colleen et Jamie sont des femmes parfaitement ordinaires, très marquées l’une et l’autre par des mariages ratés. Ancienne chrétienne exaltée, la première aurait, selon la police de Philadelphie, tenté de se suicider en 2005. En quête de spiritualité, elle était aussi, semble-t-il, portée sur les spiritueux. Selon un enquêteur, sa vie était « aussi dure qu’une chanson de musique country ». On ignore la date et les circonstances de sa conversion à l’islam. La seconde, raconte sa mère, « se sentait seule » et « cherchait quelqu’un qui l’aimerait ». Un « petit chien perdu », confirme son frère.
Lasses de leurs mornes existences, les jeunes femmes se sont lancées dans une double vie, ont pris des noms de guerre et se sont fixé une terrible mission. « Il y a sur internet des messages, fréquemment téléchargés, qui appellent les femmes à rejoindre le terrorisme et à soutenir ceux qui s’engagent dans cette voie. Les djihadistes leur assignent un rôle de soutien psychologique et de recrutement, explique encore Mathieu Guidère. Face à la pression sécuritaire, ils sont passés d’une doctrine organisationnelle fondée sur des cellules au recrutement d’individus isolés, capables d’agir seuls, sans soutien logistique. »
Et c’est justement ce qui fait frémir l’Amérique. Car si Colleen LaRose a pu devenir le « monstre aux yeux verts de YouTube », combien d’autres blondes, incendiaires quoique born in the USA, attendent-elles de passer à l’action ?
Le 18 mars, Djihad Jane a comparu, souriante, devant un tribunal de Philadelphie et a plaidé non coupable.
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