ABO mode d’emploi
Gabon : changement d’ère
Depuis quelques semaines, la famille du président a quitté sa maison du quartier chic de La Sablière pour s’installer dans des appartements privés, dans l’enceinte du Palais, au cinquième étage du bâtiment principal. Logé à deux pas du bureau, dont il n’a pas changé la décoration depuis la disparition de son père, Ali Bongo Ondimba (ABO) peut donc commencer à 7 h 30 sans gêner la circulation du boulevard de l’Indépendance, sur le bord de mer. Il ne quitte le bâtiment que tard le soir, sous l’œil vigilant du fidèle M. Park, le patron coréen de sa sécurité, qui le suit depuis une trentaine d’années.
Le dispositif de sécurité est complété par des hommes de confiance, tels que le général Alioune Ibaba, chef d’état-major particulier, le général Grégoire Kouna, commandant de la Garde présidentielle, Abel Sougou, patron de la gendarmerie, et Jean Claude Ella-Ekogha, chef d’état-major général de l’armée. Les gardiens du temple sont chapeautés par Léon Paul Ngoulakia, secrétaire général du Conseil national de sécurité.
Au quotidien, le fonctionnement de la présidence a été réorganisé. Le secrétaire général, François Engongah Owono, en est le chef d’orchestre. Ses attributions pourraient être calquées sur celles de son homologue français, Claude Guéant, si on lui ajoutait le penchant diplomatique de ce dernier. Mais comment jouer les courroies de transmission entre le président et le gouvernement lorsque, par une habitude héritée d’Omar Bongo Ondimba, tout le monde ne veut parler qu’au patron ?
Les nouvelles règles n’ont pas manqué de susciter des échanges aigres-doux au sein de l’exécutif. Des guerres d’influence poussent certains collaborateurs du président à se détester. Les anciens du ministère de la Défense affectés à la présidence s’opposent à d’autres cercles de conseillers, amis et proches collaborateurs du chef de l’État. Parmi eux, le porte-parole Guy Bertrand Mapangou, le directeur de la communication Sébastien Ntoutoume, le chef d’état-major particulier Alioune Ibaba, mais aussi Jean-Pierre Oyiba, le directeur de cabinet démissionnaire, qui n’est pas issu du ministère des Armées. À peine installé, ce groupe soudé a donc déjà un « martyr », Oyiba, et certains en son sein croient, à tort, que la source de Jeune Afrique dans l’affaire des chèques de la Beac appartient à l’un des clans rivaux.
S’il n’y a pas « d’homme fort » au Palais en dehors du « Boss », on sait au moins qui certains Gabonais aiment détester : le chef de cabinet, le Béninois Maixent Accrombessi, qui irrite à tous les étages du Palais. Suspect d’intrigues de cour pour les uns, « condescendant » pour d’autres, ses détracteurs lui reprochent d’être moins discret que son compatriote et conseiller d’ABO, Jean-Denis Amoussou, et encore moins que l’énigmatique Samuel Dossou, « le Béninois » de feu OBO, dont le fils, Steve, a épousé Malika, la fille aînée du président, le 20 février dernier.
Après « les heures de bureau », voici venue l’heure des visiteurs du soir, dont fait partie l’influent Alex Bongo Ondimba, cadre à Gabon Télécom. Quoique proche de son président de frère, il ne fait pas partie des conseillers spéciaux. Il n’empêche, Alex « travaille » dans l’ombre et œuvre notamment dans les liens avec la franc-maçonnerie. Les relations d’Ali avec sa sœur Pascaline, ancienne directrice de cabinet d’OBO, alimentent les conjectures. Elle a toujours son bureau de haut représentant personnel du président. Reste à savoir si ses absences sont dues à son goût des voyages ou à des bisbilles avec son frère.
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