Moi, Ali Soumaré, 29 ans, bouc émissaire et futur (?) élu
Les attaques indignes de ses adversaires de droite ne desservent pas forcément le jeune candidat socialiste aux élections régionales dans le Val-d’Oise.
Après avoir été traité par ses adversaires de l’UMP de « délinquant multirécidiviste chevronné » – en 1999, il a été condamné à six mois de prison pour un délit mineur –, puis dédouané par la procureure de Pontoise, Ali Soumaré, la tête de liste socialiste aux élections régionales (14-21 mars) dans le Val-d’Oise, en région parisienne, peut continuer de faire campagne. L’honneur presque sauf – et les projecteurs des médias désormais braqués sur lui –, le candidat peut se concentrer sur ce qui l’intéresse vraiment : le « débat d’idée », bien sûr.
Né le 25 décembre 1980 à Montmorency, dans le Val-d’Oise, Ali Soumaré a 8 ans lorsque sa famille s’installe à Villiers-le-Bel, ville du nord de Paris qu’il ne quittera plus. Originaires du Guidimakha malien, ses parents immigrèrent en France à la fin des années 1960. Blanchisseur, puis conducteur de poids lourds à l’aéroport de Roissy, son père a toujours été syndicaliste. N’ayant jamais coupé le cordon avec ses racines, il a élevé ses six enfants dans le souvenir de la culture soninké. Son leitmotiv ? « Militer et non se cacher. »
Militant précoce
Comment s’étonner que le jeune Ali ait, dès le collège, fourbi ses armes de militant ? Pour partir en classe d’hiver, il convainc ses camarades et son professeur principal de monter un dossier pour profiter des subventions accordées aux quartiers « sensibles ». Parce qu’il rêve de neige ? Non, « par goût de l’action, de la mobilisation, parce que tout était bon pour sortir de l’école », sourit-il. C’est un garçon turbulent et farceur. À l’école primaire, il se souvient avoir kidnappé… le chien de la directrice. « Je crois que je regardais trop la télévision », dit-il.
Vient l’heure de choisir une orientation. Ali Soumaré n’a qu’une envie : devenir animateur social. « Ce n’est pas un métier », lui rétorque la conseillère d’orientation, qui lui propose celui d’ambulancier. L’entêté abandonne la terminale et s’inscrit dans un centre pour obtenir son Brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur (Bafa). Dès l’âge de 17 ans, il travaille à mi-temps dans un centre social. « Petit à petit, je me suis rendu compte que, si rien n’était fait pour tous ces enfants d’origine populaire, les effets seraient catastrophiques », explique-t-il. Militer et non se cacher…
Le jeune homme, qui a beaucoup d’admiration pour Dominique Strauss-Kahn, l’ancien maire socialiste de Sarcelles, décide, en 2000, de s’impliquer dans le Mouvement des jeunes socialistes. Fréquenter les politiques le convainc que « c’est là que les choses se déterminent ». Mais le vrai déclic n’aura lieu que deux ans plus tard, au second tour de la présidentielle qui oppose Jacques Chirac à Jean-Marie Le Pen. Cette montée en puissance du Front national ne peut pas refléter la France qu’il connaît et qu’il aime. « Cela peut sembler paradoxal, analyse-t-il, mais le fait d’être malien, de connaître mes origines et ma culture m’a aidé à construire ma citoyenneté française. Et je ne suis même pas schizophrène ! »
Émeute dans la ville
À Villiers-le-Bel, en 2007, une course-poursuite s’engage entre une voiture de police et deux adolescents en scooter. Elle s’achève par la mort de ces derniers. Aussitôt, la ville s’embrase. Les familles des victimes lui demandent d’être leur porte-parole. Il se retrouve médiateur et s’efforce de faire le tampon entre une jeunesse qui crie vengeance et des forces de police prêtes à en découdre. « Ici, tout le monde le connaît. C’est un garçon mature, serein. Si quelqu’un pouvait calmer les choses, c’était bien lui », estime son vieil ami Idrissa Diabira. Sa maturité impressionne jusqu’à François Pupponi, le député-maire socialiste de Sarcelles, qui, deux ans plus tard, le fait entrer dans son cabinet. « Il est ambitieux et travailleur, commente le parlementaire. S’il reste proche des populations et de ses convictions, il ira très loin. »
Quand on demande à Ali Soumaré quelles sont ses ambitions à moyen et à court terme, il répond, une lueur de malice dans les yeux : « Rejoindre ma femme et ma petite fille de 4 mois. »
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