« Made in China »

Fawzia Zouria

Publié le 22 février 2010 Lecture : 2 minutes.

Je ne suis jamais allée en Chine. Mais tous les jours que Dieu fait je consomme chinois et je bénis la providence d’avoir créé l’empire du Milieu, qui sait soigner nos soifs d’achat et devancer nos désirs enfouis. Que l’Occident, dans son orgueil, refuse d’admettre que la Chine a sauvé de la crise des secteurs entiers de son économie – dont récemment l’industrie de luxe française –, ­libre à lui.

Mais moi, je dis qu’il faut être riche pour cracher sur les produits asiatiques. Que nous, Africains, Arabes et autre démunis, savons gré à la Chine d’avoir arrosé de ses bienfaits matériels nos ruelles et nos marchés du Sud, des souks de Casablanca aux trottoirs de la médina de Tunis – dits « en jachère » parce que réservés aux articles chinois –, en passant par les faubourgs de Marseille, ville musulmane comme chacun sait. Mme Kinza peut changer de chaussures toutes les semaines si ça lui chante. Si Mohamed peut taper sur un clavier venu de Pékin, fût-il sans garantie. Et les bambins paraderont le jour de l’Aïd en vêtements de contremarque. Qu’Allah bénisse la Chine !

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Et voilà que, après avoir satisfait tous nos désirs de consommation, notre bienfaitrice se lance dans la distribution d’un produit miracle censé contourner les tabous du corps et faire l’économie des scandales conjugaux et autres crimes d’honneur. En effet, la société Gimino vient de mettre sur le marché… des hymens. Si, je vous jure ! Et la pub crève déjà les écrans égyptiens, au grand dam des cheikhs d’Al-Azhar. De quoi s’agit-il ? D’un kit de virginité à l’usage des demoiselles qui n’ont pu garder leur hymen intact jusqu’au mariage. Il est constitué d’une petite poche translucide remplie de liquide rouge dont la belle doit « s’équiper » une demi-heure avant le rapport sexuel. Sous l’effet de la chaleur corporelle, la membrane artificielle se dilate puis se rompt lors de la pénétration, provoquant la sensation d’une vraie défloration. On s’en doute, sitôt connue, l’invention a provoqué des polémiques dans les pays arabo-musulmans. Les imams se sont arraché les cheveux, les mamans ont feint de s’indigner, les médecins ont ricané quand ils n’ont pas prévenu sur les risques ­sanitaires, les sexologues ont annoncé la fin proche de la virginité et la démocratisation de l’hymen artificiel. Quant aux intéressées… elles en étaient déjà à négocier les kits via internet et d’autres voies d’acheminement secrètes.

Il paraît que ça marche et que les bonhommes n’y voient que du feu. À condition de ne pas faire plus qu’il n’en faut. Comme cette Saoudienne qui, pour fêter son deuxième anniversaire de mariage, a voulu surprendre son époux en lui offrant pour la seconde fois un hymen scellé made in China. Et qui s’est retrouvée à la porte. Ce n’est pas aux Asiatiques que l’époux en voulait. Il a soupçonné sa femme d’avoir eu recours au même procédé lors de sa première défloration. Ah, ces hommes ! Même avec les meilleures intentions, on n’arrive jamais à leur faire plaisir. Que ce soit en succombant au vice ou en multipliant les vertus !

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