Fin de la lune de miel

Associés malgré eux dans un gouvernement d’union, le président et le Premier ministre se déchirent autour d’une affaire de corruption et mettent en péril une paix fragile.

Manifestation le 17 février pour demander le départ des ministres incriminés. © Reuters

Manifestation le 17 février pour demander le départ des ministres incriminés. © Reuters

NICOLAS-MICHEL_2024

Publié le 23 février 2010 Lecture : 2 minutes.

Qui est le chef ? Cette question résume la grave querelle qui oppose le Premier ministre, Raila Odinga, au président, Mwai Kibaki. Le 14 février, Odinga a annoncé que, après les rapports de l’auditeur général et de la firme d’audit PricewaterhouseCoopers, il suspendait de leurs fonctions le ministre de l’Agriculture, William Ruto, et celui de l’Éducation, Sam Ongeri, pour une période de trois mois. À peine l’information avait-elle circulé qu’Ongeri répliquait : « Je n’ai reçu aucune indication de la part de l’autorité responsable. Et je sais très bien qui est l’autorité responsable. » Peu de temps après, le président Kibaki prenait position en faveur des deux ministres soupçonnés de corruption : « Les dispositions légales sur lesquelles le Premier ministre s’est appuyé ne lui confèrent pas l’autorité nécessaire pour démettre un ministre de ses fonctions. » Et les ministres n’ont pas quitté leur bureau. Le recours aux seuls textes, diversement interprétés par les parties, ne permettra pas de trancher le différend.

Réunis à la tête d’une coalition hétéroclite obtenue à l’arraché par Kofi Annan alors que le pays menaçait de sombrer dans la guerre civile, Odinga et Kibaki ont réussi à donner le change pendant près de deux ans – au prix d’un certain immobilisme. Si la crise éclate aujourd’hui, c’est pour deux raisons essentielles. D’une part, le Kenya est en train de se doter d’une nouvelle Constitution définissant les rôles du président et du Premier ministre, qui doit être soumise à référendum en 2010. D’autre part, les États-Unis, principal allié du pays, ont signifié qu’ils se montreraient très fermes en matière de corruption. Les réformes en effet se font attendre et les scandales se multiplient.

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Sam Ongeri serait responsable de l’évaporation de près de 1 million d’euros destinés à l’école primaire, quant à William Ruto, candidat déclaré à l’élection présidentielle de 2012, il serait impliqué dans le scandale du maïs subventionné. Alors qu’en 2008 les prix des produits alimentaires s’envolaient, du maïs destiné aux Kényans les plus pauvres était revendu de manière illégale : un détournement évalué à 19 millions d’euros. Dans cette affaire, huit hauts fonctionnaires ont été suspendus de leurs fonctions le 13 février par le président.

Alors que la coalition au pouvoir craque de toutes parts, Odinga et Kibaki campent sur leurs positions. Le premier a officiellement demandé l’intervention de Kofi Annan et de l’Union africaine pour résoudre le différend. Le feu qui couve depuis 2007 menace de reprendre.

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