Sade, toujours aussi envoûtante

L’artiste d’origine nigériane revient après dix ans d’absence et plus de 50 millions d’albums vendus. Seulement une semaine après sa sortie, Soldier of Love est déjà en tête des ventes aux États-Unis.

Sade © EPIC RCA/SONY MUSIC

Sade © EPIC RCA/SONY MUSIC

Publié le 18 février 2010 Lecture : 4 minutes.

« Je n’enregistre de disque que lorsque je sens que j’ai un message à faire passer. Faire de la musique uniquement pour la vendre ne m’intéresse pas. Sade n’est pas une marque commerciale. »

C’est par ces mots que l’artiste d’origine nigériane justifie ses dix ans d’absence depuis Lovers Rock, et, suprême pied de nez, la voici revenir en ne nous dévoilant que son dos sur la pochette du tant attendu Soldier of Love. Difficile de faire plus mystérieux. Et c’est là le paradoxe – et le charme – de Sade Adu : elle et son groupe, inchangé depuis 1983, ont été capables de vendre 50 millions d’exemplaires de leurs six albums (dont le best of) en cultivant une discrétion qui détonne dans un monde où tout est surmédiatisé et formaté.

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Chez Sade, en revanche, tout est dans le style : des musiques inspirées de la soul, du rhythm and blues, du jazz ou encore de la musique caribéenne et latino, servies par des musiciens précis comme des horloges suisses et suintant le groove dans chacune des notes plaquées sur leurs instruments. Et puis, il y a Helen Folasade Adu, incarnation du groupe. Une métisse africaine qui chante l’amour depuis vingt-sept ans, envoûtante grâce à un charisme hors norme et à une grâce indéfectible. Là où les divas du R’nB se dandinent et se dévêtissent toujours plus, Sade pour son grand retour n’a besoin que d’exposer son dos pour reconquérir son public. « Reconquérir », car la voici en guerrière dans le clip du titre éponyme de l’album, « Soldier of Love ». Et les ­attentes sont grandes. Le disque arrivait en deuxième position sur la version anglaise du site Amazon en termes de précommandes.

Helen Folasade Adu est née en 1959 à Ibadan, au Nigeria, d’un père nigérian et d’une mère britannique. Des parents qui divorcent lorsqu’elle n’a que 4 ans. Elle déménage alors pour la Grande-­Bretagne avec sa mère et ne retournera dans son pays natal qu’à 21 ans. Si elle ne s’est jamais sentie exclue de ce pays, elle n’y a pas non plus ­d’attaches particulières. Surtout depuis que les derniers membres de sa famille sont décédés. Elle sera cependant la seule artiste d’origine africaine à se ­produire lors du fameux concert Live Aid, contre la famine en Afrique, organisé par Bob Geldof en 1985, à Wembley. Et vingt ans plus tard, elle participe à une chanson pour un DVD au profit du Darfour, Voices for Darfur.

« Gloire couronnée »

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Après avoir suivi des études de stylisme et de mode, Sade devient choriste pour des groupes de funk au début des années 1980. Et rencontre ses futurs compagnons de route, avec qui elle forme le groupe Sade, contraction de son nom yoruba, Folasade, qui veut dire « gloire couronnée ».

Le groupe impose tout de suite son style avec Diamond Life (1984), ­quatre fois disque de platine. Ce premier album aligne les tubes, dont le mythique « Smooth Operator ». Alors que batteries électroniques et synthétiseurs dominent les sonorités pop des années 1980, Sade propose un style jazzy à contre-courant. À l’époque où émergent des stars ultramédiatisées et provocatrices à l’instar de Madonna, Helen Adu, elle, subjugue son ­auditoire par sa discrétion, sa voix et son glamour. L’album est un succès. Il entre rapidement dans le top 10 des ­ventes en Grande-Bretagne et récolte un Grammy Award aux États-Unis dans la catégorie « Révélation de l’année ».

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Concoctés selon la même recette, les trois opus suivants enchaînent les tubes – « Paradise », « The Sweetest Taboo », « Your Love Is King » – et sont tous disques de platine (Promise et Love Deluxe le sont quatre fois ; Stronger Than Pride, trois fois).

En 1992, alors au sommet de sa gloire, Helen décide de faire une pause afin de s’occuper de sa famille. « Je préfère passer du temps avec mes proches qu’avec les journalistes », déclare celle que ses amis ont surnommée « Howie », en référence au milliardaire fantasque Howard Hugues, qui avait la particularité de vivre reclus. Une discrétion qui aura aussi l’inconvénient de susciter les rumeurs les plus diverses, comme la phobie des paparazzis, l’anorexie, la dépression. Jusqu’aux plus farfelues, comme le possible rachat du club de football de Fulham par la belle Helen. Son absence des médias et ses refus d’interviews ne feront qu’entretenir ces fantasmes.

En 2000, elle sort le magistral Lovers Rock (trois fois disque de platine). Le style est dans la plus grande tradition de ses albums, les mélanges musicaux sont présents avec quelques teintes de reggae, souvenir d’un séjour en ­Jamaïque. C’est d’ailleurs l’une des particularités du groupe : enrichir son répertoire de nouvelles sonorités sans jamais en abuser ni dérouter son public. Un soupçon de trip-hop typé Massive Attack vient égrener « Soldier of Love » qui, à coup sûr, va encore charmer les radi os et devenir un tube. Si une partie de l’album renoue avec les standards du groupe, le disque contient aussi d’autres pépites comme ce reggae enlevé (« Babyfather ») chanté en compagnie de sa fille, Ila, âgée de 14 ans, ou cette soul émouvante (« In Another Time »). Ce nouvel album regorge de ces sonorités intemporelles qui charmeront les plus assidus de ses fans et ouvriront des portes à ceux qui voudraient découvrir l’univers passionné de Sade. 

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