L’heure de la pause publicitaire
Lancement de produits ou promotion de nouvelles gammes, consolidation marketing, campagnes de fidélisation… Les annonceurs recherchent avant tout l’efficacité sur un marché rattrapé par la crise mondiale.
Nul n’est prophète au pays de la publicité. Début 2009, Sigma Conseil, le cabinet d’études dirigé par Hassen Zargouni, tablait sur une croissance de plus de 10 % du marché publicitaire au Maghreb. Or, avec 580,5 millions d’euros d’investissements publicitaires (IP) en 2009, contre 570,4 millions en 2008, ce marché n’a crû que de 1,8 % – bien loin de la hausse de 11 % de l’année précédente, mais beaucoup mieux que la baisse de 10 % enregistrée au niveau mondial.
Des trois pays étudiés, l’Algérie est le marché qui a le plus régressé (– 8,6 %). Si tous les médias ont connu une baisse, la radio est le support le plus affecté (– 30 %). « Malgré son immense potentiel », note Zargouni, le pays semble toujours entravé par « une culture du monopole ». En Tunisie, c’est l’affichage qui a dégringolé, en raison du renforcement de la réglementation en 2008. Au Maroc, le paradoxe demeure : le marché publicitaire le plus développé de la région (398,1 millions d’euros, soit plus du triple de l’Algérie) est aussi celui au pouvoir d’achat le plus faible. Or le budget des annonceurs y est de 12,70 euros par habitant, contre 7,10 euros en Tunisie et… 3,40 euros en Algérie. La raison ? Au Maroc, la publicité a pu mûrir grâce à la présence ancienne de nombreuses multinationales et à un secteur audiovisuel libéralisé.
Télécoms en tête
Côté annonceurs, le palmarès est, peu ou prou, le même qu’en 2008. Les télécoms trustent le Top 10 au Maghreb. Six des huit opérateurs de la région y figurent, dont – et c’est une première – une société tunisienne, Orascom Telecom Tunisia. Seuls Algérie Télécom et Tunisie Télécom manquent à l’appel… Au total, le secteur a déboursé plus de 133 millions d’euros. Mais les acteurs de l’agroalimentaire ont musclé leur offensive. Le groupe tunisien Gias (huile Nejma, margarine Goldina…) s’est imposé comme le deuxième annonceur du pays, avec 6,9 millions d’euros d’IP (+ 956,9 % !). En Algérie, Cevital tient le haut du pavé, si l’on ajoute aux 6,8 millions d’euros investis en son nom les budgets de Hyundai et de Samsung, dont il a l’exclusivité en Algérie. Total de la facture : plus de 11,8 millions d’euros, qui en font le premier annonceur du pays, devant les télécoms. Autre surprise algérienne : Renault s’est imposé en 2009 à la 6e place, avec 3,7 millions d’euros de budget pub, soit un bond de 94,9 %. Le lancement de trois modèles en 2009 explique la boulimie du constructeur, qui veut ravir à Hyundai le leadership du marché automobile.
Malgré leur pole position, les télécoms, qui se sont serré la ceinture publicitaire, sont responsables de la baisse globale enregistrée en 2009. Pourquoi ce régime de la pub ? C’est dû, selon Hassen Zargouni, à « une période de consolidation marketing : compte tenu du taux de pénétration élevé de la téléphonie, les opérateurs sont dans une logique de fidélisation qui privilégie le marketing direct [comme Djezzy en Algérie, qui envoie des SMS à ses abonnés, NDLR]. Ils n’ont plus besoin d’utiliser le média fédérateur et grand public qu’est la télévision pour communiquer ».
Algérie : une baisse de 21,7 %
Du coup, leurs IP ont subi un régime drastique : – 21,7 % en Algérie, où Djezzy, leader du secteur, a réduit les siens de près d’un tiers. Idem au Maroc : l’offensive de Méditel (+ 20,6 %), devenu 100 % marocain en 2009, ne compense pas la chute des IP de Wana dans la publicité télévisuelle (– 44,9 %), où jusqu’ici l’opérateur était le premier annonceur. Sachant que le petit écran marocain concentre 37 % du total des IP, on comprend mieux les performances à la baisse du secteur. Comment s’annonce 2010 ? Si, selon le patron de Sigma, « rien n’indique que la donne va changer au Maroc », le lancement d’Orange en Tunisie va sans doute bouleverser le jeu dans un secteur des télécoms déjà très concurrentiel. De son côté, Djezzy veut reprendre la main publicitaire en Algérie. Objectif : améliorer son image de marque. Mise à mal depuis que la société a cédé à Lafarge les cimenteries rachetées à l’État algérien, elle a été définitivement écornée par l’égyptianité d’Orascom sur fond de rivalités diplomatico-footballistiques.
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