Un casse-tête nommé Ahmed

Condamné à mort avec Ali le Chimique, qui, lui, a été exécuté, l’ex-ministre de la Défense semble bénéficier d’un sursis lié à son statut de héros national.

Sulatan Hachem Ahmed lors d’une auition devant le tribunal spécial irakien, le 18 décembre 2004 © AFP

Sulatan Hachem Ahmed lors d’une auition devant le tribunal spécial irakien, le 18 décembre 2004 © AFP

Publié le 2 février 2010 Lecture : 2 minutes.

Ali Hassan al-Majid, alias Ali le Chimique, a été exécuté par pendaison à Bagdad le 25 janvier à l’aube, soit une semaine après que le Tribunal spécial irakien (TSI, chargé de juger les dignitaires du régime de Saddam Hussein) eut prononcé à son encontre une quatrième peine capitale. Cousin et ancien homme de confiance du raïs déchu, il a été jugé coupable dans l’affaire dite « d’Anfal », nom de l’opération qui, en mars 1988, avait coûté la vie à la quasi-totalité de la population du village de Halabja (près de 5 000 victimes), au cœur du Kurdistan irakien. Mais si Ali le Chimique a bien été exécuté, son principal coaccusé, le général Sultan Hachem Ahmed, ex-ministre de la Défense, condamné à mort par le même tribunal, semble bénéficier d’un sursis.

Sa culpabilité dans le massacre de Halabja ne fait pourtant aucun doute. Commandant de la campagne « Anfal », Ahmed faisait un rapport quotidien à Saddam sur le déroulement de l’opération. Il fait donc partie des anciens dirigeants irakiens « vomis » par les Kurdes. Les chiites ne l’apprécient pas plus. Ahmed est accusé d’avoir piloté la répression qui s’est abattue sur cette communauté au lendemain de la défaite irakienne contre la coalition, en mars 1991. À quoi doit-il d’être encore en vie ?

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Sultan Hachem Ahmed est considéré comme un héros de guerre. C’est lui qui a dirigé la contre-offensive dans le Chatt al-Arab, en 1987, pour chasser l’ennemi iranien de la ville irakienne de Fao. En outre, il est issu de la prestigieuse tribu sunnite des Al-Taï. Et s’il ne fait pas partie du clan de Tikrit, au pouvoir durant le long règne de Saddam, il était le beau-père de feu Qoussaï, fils de l’ex-raïs et patron des services irakiens du Baas et de la Garde nationale. Autre facteur ayant favorisé le sursis accordé à Ahmed : il était apprécié des Américains. Non pas pour avoir signé le cessez-le-feu, en mars 1991, avec le général Schwarzkopf, mais parce qu’il fut le responsable le plus élevé de la hiérarchie à s’être rendu aux Américains contre l’engagement d’avoir la vie sauve.

Après sa reddition, à Mossoul, en avril 2003, il s’était montré bavard, révélant les caches de nombreux chefs des factions insurgées et décrivant avec minutie les tactiques de guérilla arrêtées avant l’invasion anglo-américaine de mars 2003. Le général David Petraeus, alors commandant des opérations dans le Nord irakien, aujourd’hui commandant en chef des forces américaines au Proche- et au Moyen-Orient, l’avait alors qualifié « d’homme d’honneur ». Difficile de pendre vulgairement un officier si apprécié de Petraeus. Dernier obstacle à la pendaison d’Ahmed. Selon la loi irakienne, l’ordre d’exécution doit être signé par le président (le Kurde Jalal Talabani) et ses deux coprésidents, dont le sunnite ­Tarek al-Hachemi. Ce dernier sait qu’en signant il se mettra à dos une large frange de sa communauté.

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