Indigénéité : le mal à la racine
Au moins 300 morts, 40 000 déplacés, des corps jetés dans des puits… Les affrontements de Jos, au cours de la semaine du 17 janvier, ont mis le charisme de Goodluck Jonathan à l’épreuve. Le 26 janvier, le numéro un bis du Nigeria s’est rendu dans la capitale de l’État du Plateau et a appelé à « stopper le carnage ». Une semaine auparavant, il avait envoyé des renforts militaires. Ses réactions effleurent le nœud du problème. Les violences à Jos sont chroniques. En novembre 2008, 700 personnes y ont été tuées. Les combats opposent toujours chrétiens et musulmans. Mais la fracture religieuse se superpose à une autre, aussi profonde : les rivalités entre « indigènes » et « non-indigènes ».
Au Nigeria, un indigène est celui qui peut justifier que ses ancêtres sont originaires de l’un des trente-six États de la fédération dont il se réclame. Un natif de Rivers, dans le Sud, aura beau vivre à Kano, dans le Nord, pendant trente ans, il y sera toujours considéré comme un étranger.
La distinction date des années 1970. Elle s’est accentuée ces quinze dernières années. En 1996, une Commission du caractère fédéral (FCC) a vu le jour. Elle veille au respect des droits des indigènes dans chaque État. Emplois publics, bourses étudiantes : ils passent avant les étrangers. Avec l’augmentation du nombre d’États (de dix-neuf à trente-six) entre 1979 et 1999, le nombre d’étrangers et d’indigènes a mécaniquement augmenté. La richesse en minerais de l’État du Plateau, majoritairement chrétien, a toujours attiré des non-indigènes. La plupart viennent du Nord et sont surtout musulmans. Comme ailleurs, ils sont victimes de discriminations. S’ajoutant à un clivage religieux, ces dernières tournent plus souvent à l’affrontement. « Le Plateau est devenu un lieu d’expression exacerbée du problème de l’indigénéité », explique Daniel Bach, chercheur au Centre d’étude d’Afrique noire.
La solution ? L’imam Ashafa, lauréat, en 2009, du prix de la Fondation Chirac pour la prévention des conflits, pense l’avoir trouvée : « Un citoyen doit être citoyen partout. Il faut supprimer le concept d’indigénéité de la Constitution. » À condition qu’un leader prenne le problème à bras-le-corps.
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