Pourquoi tant de haine ?
Des corps sans vie, des coups de feu, des colonnes de fumée : quelques heures auront suffi pour que le chaos s’empare des rues de Jos. La capitale de l’État de Plateau, au centre du Nigeria, a commencé à s’embraser le 17 janvier dans la soirée. Trois jours plus tard, on déplorait près de 300 morts. Entre-temps, des milliers de soldats et de policiers s’étaient déployés dans les quartiers. Le 22 janvier, le calme était revenu, mais Jos, 500 000 habitants, ressemblait à une ville en état de siège.
Le motif ? Dans cet État-frontière entre le nord du pays, à majorité musulmane, et le Sud, à prédominance chrétienne, la religion est un point de friction récurrent. Le 17 janvier, des musulmans auraient entrepris de reconstruire une mosquée dans un quartier dont ils avaient été chassés en novembre 2008, à la suite d’émeutes qui avaient déjà causé la mort de 700 personnes. Des milices chrétiennes auraient alors déclenché des attaques, auxquelles des milices musulmanes auraient riposté. Les combattants sont armés de fusils, de flèches et de machettes. Selon l’ONG Human Rights Watch, 151 cadavres de musulmans auraient été dénombrés dans les mosquées.
Depuis l’époque coloniale, les groupes ethniques chrétiens de la région de Jos bénéficient du statut d’« indigène », qui leur donne accès à des bourses d’étudiants et à des emplois de fonctionnaires.
Mais l’État de Plateau est fertile et jouit d’un climat plus doux que le reste de la fédération. Il attire de nombreux migrants, notamment des musulmans haoussas venus du Nord. Comme l’arrivée des premiers Haoussas remonterait au début du XIXe siècle, ceux-ci réclament le même statut. Or les groupes dits « originels » ne veulent pas en entendre parler. « Jos appartient aux indigènes. Tous les Haoussas sont des colons. Quand le locataire crée des problèmes, on lui donne son congé », avait lancé le gouverneur de l’État de Plateau en 2004. Bref, la bataille pour les privilèges fait rage.
Cet embrasement a été l’occasion pour Goodluck Jonathan, le vice-président, de montrer qu’il tenait les rênes. Depuis le 13 janvier, il assure l’intérim d’Umaru Yar’Adua, le chef de l’État, gravement malade et hospitalisé depuis le 23 novembre en Arabie saoudite. « C’est une crise de trop. Le gouvernement fédéral estime qu’elle est totalement inacceptable, rétrograde et susceptible de menacer davantage l’unité de notre pays », a-t-il déclaré.
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