L’épervier ne dort que d’un oeil
La lutte contre la corruption se poursuit avec de nouvelles arrestations dont l’ancienne ministre Adama Haman. D’autres anciens membres du gouvernement et dirigeants d’entreprise publique sont venus s’ajouter aux proies de l’opération « épervier ».
Depuis l’arrestation, en août 2009, de Jean-Baptiste Nguini Effa, directeur général de la Société camerounaise des dépôts pétroliers (SCDP), la spectaculaire opération « Épervier » de lutte contre la corruption semblait marquer le pas. Mais la voici qui, en ce début de 2010, reprend de la vigueur en multipliant de nouveau les arrestations.
Le 6 janvier, Adama Haman, ancienne ministre de l’Éducation de base, limogée le 30 juin 2009, et Roger Ntongo Onguéné, 51 ans, directeur général des Aéroports du Cameroun (ADC) de 2003 à juin 2009, ont été interpellés et écroués à Yaoundé, avec une dizaine de leurs collaborateurs. Le 8 janvier, c’était au tour d’Henri Engoulou, ancien ministre du Budget, et de Catherine Abena, ancienne secrétaire d’État aux Enseignements secondaires. « Qu’on ne s’attende pas à ce que nous nous arrêtions en chemin. Nous irons jusqu’au bout, quoi qu’en disent certains », avait prévenu Paul Biya dans son discours télévisé de fin d’année.
Adama Haman, qui est de confession musulmane, est la première personnalité en vue originaire du Grand Nord à être interpellée pour sa gestion des deniers publics au sein du ministère dont elle avait la charge. Inspectrice du Trésor formée à l’École nationale d’administration et de magistrature (Enam), elle aurait pu couler une retraite paisible après treize années passées comme conseillère technique au ministère du Développement industriel et commercial. Mais en 1998, l’ambitieuse Peule ne veut pas en entendre parler. Elle réclame – et obtient – une prorogation de deux ans. Soutenue par le conseiller spécial du président, Marafa Hamidou Yaya, lui aussi originaire de Garoua (et actuel ministre de l’Administration territoriale), elle est nommée directrice générale adjointe du Crédit foncier du Cameroun, en janvier 1999.
Quatorze mois plus tard, l’influent conseiller, promu entre-temps secrétaire général de la présidence, suscite la nomination de sa protégée au gouvernement. Adama Haman devient secrétaire d’État à l’Éducation nationale. Mais c’est sur sa gestion des crédits affectés au ministère de l’Éducation de base, créé pour elle en 2005, que « Néné » va tomber en disgrâce.
Pour ceux qui suivent de près la guerre des clans et comptent les points, « l’élimination » d’Adama Haman n’aura aucun impact sur l’équilibre des forces en présence. Brouillée depuis des années avec Marafa Hamidou Yaya pour avoir frayé avec l’ennemi dans la bataille qui oppose ce dernier à la puissante famille Hayatou au sein du lamidat [chefferie traditionnelle] de Garoua, « Néné » aurait, selon Guibaï Gatama, le directeur de l’influent Œil du Sahel, « présumé de ses forces dans le marigot ». Ni sa proximité avec l’ancien Premier ministre Ephraïm Inoni ni son strapontin de commissaire aux comptes du parti au pouvoir ne l’ont préservée des investigations des enquêteurs.
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