Roland Riboux : « Nos marchés ne sont pas assez protégés face aux importations »
Président de l’Association des industriels de la filière oléagineuse de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (AIFO-UEMOA) et PDG de Fludor Bénin.
Jeune Afrique : Le regroupement de Sifca avec Wilmar et Olam est-il une menace pour les agro-industriels de l’UEMOA ?
Roland Riboux : Wilmar et Olam n’ont pas attendu Sifca pour pénétrer le marché ouest-africain. Ils vendaient déjà de l’huile dans la sous-région. Sifca, en s’associant avec les groupes asiatiques, souhaite améliorer la productivité des plantations ivoiriennes et le fonctionnement de ses usines. En Asie, le rendement au champ et dans les industries oléagineuses est bien meilleur qu’en Afrique.
Les opérateurs sont-ils suffisamment protégés ?
Nos marchés ne le sont pas suffisamment par rapport aux importations. La Côte d’Ivoire semble être le pays de la zone où la protection est le plus efficace. Les services douaniers protègent l’industrie nationale en appliquant des taxes. Dans les autres pays de la zone, les mécanismes de protection ne sont pas toujours appliqués. Et même lorsqu’ils sont appliqués, nous avons constaté des fraudes. Certains importateurs ne déclarent, par exemple, que le dixième de leurs marchandises.
Est-il vrai que le coût de production d’huile de palme est moindre que celui d’huile de coton ?
C’est exact, et cela tient à des facteurs agrologiques. Les plantations de palmiers à huile, une fois ceux-ci arrivés à maturité, ne nécessitent qu’un entretien léger. À partir des régimes de palmiers, on obtient près de 50 % d’huile. Pour le coton, c’est différent. La graine n’est qu’un produit complémentaire du coton qui est transformé en fibre. Elle ne représente que 16 % à 17 % du poids du coton-graine. De plus, contrairement au palmier à huile, qui sert exclusivement à produire de l’huile, la graine de coton est également utilisée dans l’alimentation animale. Et les producteurs européens, subventionnés, viennent acheter une partie de leur graine en Afrique. Donc, les tarifs grimpent, ce qui augmente le prix de revient de l’huile de coton.
Dans ces conditions, l’huile de coton est-elle appelée à disparaître ?
Elle pourrait disparaître si rien n’est fait pour mieux organiser la filière et en améliorer la compétitivité. Nos autorités doivent également renforcer leurs actions pour faire changer les règles du commerce mondial et contraindre les États-Unis et la Chine à ne plus subventionner leurs filières coton. Ces aides favorisent la production dans leurs pays respectifs au détriment de celle des pays du Sud. Les subventions font baisser les cours. Au Mali, les paysans ont progressivement quitté le coton pour faire du riz. Au bout de la chaîne, l’approvisionnement en graine se réduit. Et les huileries en pâtissent.
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