Quelles pistes pour l’après Copenhague?
La conférence sur les changements climatiques réunie sous l’égide des Nations unies à Copenhague a débouché sur un consensus minimal sans engagements contraignants. Les prochains sommets sur le climat prévus en 2010 auront pour tâche d’applanir les difficultés non résolues.
Le meilleur moyen d’endiguer le réchauffement de la planète consiste à se hâter… lentement. Tel est le seul consensus, pour le moins minimaliste, auquel sont parvenus les cent dix-neuf chefs d’État et de gouvernement – dont trente et un Africains – qui ont participé au 15e sommet mondial organisé par la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC) à Copenhague (Danemark), du 7 au 18 décembre.
On attendait 15 000 délégués. Le Bella Center en aura finalement accueilli trois fois plus : 45 000, dont 11 500 représentants des 192 États membres de l’ONU, 23 000 observateurs de la société civile et 3 500 journalistes.
Sonnette d’alarme
Plusieurs étapes sont prévues pour l’après-Copenhague et d’ici à la fin programmée du protocole de Kyoto, le 31 décembre 2012. D’abord, le 40e anniversaire du Jour de la Terre, le 22 avril 2010. Ensuite, le 16e sommet de la Convention, à Mexico, en novembre. Une réunion décisive, qui pourrait être avancée au mois de juillet afin que les États adoptent le texte définitif du traité, le signent et mettent en route le processus de ratification, qui peut durer deux ou trois ans. La dernière étape, celle du bilan, aura lieu à Johannesburg, en Afrique du Sud, qui accueillera le 17e sommet, en novembre-décembre 2011.
Le changement climatique est devenu un problème mondial depuis 1988, lorsque deux organisations onusiennes – l’Organisation météorologique mondiale (OMM) et le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) – ont tiré la sonnette d’alarme. La Terre, ont-elles averti, se réchauffe à un rythme supérieur à celui du millénaire précédent. Selon les experts, la température moyenne a atteint 14 °C, soit une augmentation de 0,74 °C au cours du XXe siècle, contre 0,6 °C au cours du siècle précédent. C’est peu à l’échelle humaine, mais beaucoup trop à celle du monde.
Depuis des millions d’années, la Terre se refroidit et se réchauffe « naturellement », selon des cycles plus ou moins longs. Aujourd’hui, à en croire les néoclimatologues, l’humanité est directement menacée. Si l’on n’adopte pas des mesures drastiques pour lutter contre la pollution, avancent-ils, la température globale de la Terre pourrait grimper de 4,8 °C d’ici à 2100, et le niveau de la mer s’élever d’au moins 20 cm, soit deux fois plus qu’au cours du siècle passé. Des millions de personnes seraient alors obligées d’émigrer, et des zones côtières seraient dévastées par des cyclones plus fréquents (voir notre enquête, dans J.A. n° 2553).
« Prédictions aléatoires »
Jusqu’à présent, les Nations unies ont réagi en instituant un Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), qui a reçu le Nobel de la paix en 2007, et en élaborant le protocole de Kyoto (1995-1997). Signé par les États-Unis, à l’époque les plus gros pollueurs de la planète, mais non ratifié en raison de l’opposition de George W. Bush, qui refusait de « sacrifier le mode de vie des Américains » à des « prédictions aléatoires », Kyoto a pu néanmoins rallier trente-sept pays industrialisés. Ces derniers s’étaient engagés à réduire leurs émissions de gaz carbonique de 5 % à la fin de 2012 par rapport au niveau atteint en 1990 (année imposée par la Russie pour tenir compte de la situation des pays de l’ex-bloc soviétique). Mais cet accord intérimaire n’engageait pas les pays en développement, en particulier la Chine, l’Inde ou le Brésil, en phase d’industrialisation rapide. Et il n’a pu entrer en vigueur que le 16 février 2005, huit ans après son adoption.
Son processus de ratification s’est révélé extrêmement complexe, le traité empiétant parfois sur la souveraineté des États. Par exemple, en limitant leur liberté d’utiliser, pour développer leur économie, des énergies fossiles bon marché comme le charbon, une matière première abondante aux États-Unis, en Chine, en Australie, en Afrique du Sud…
Nul n’ignorait ces obstacles et ces pesanteurs. Trop ambitieux, poussé par les lobbies climatiques et médiatiques, le sommet de Copenhague n’a pu réaliser l’impossible : un accord contraignant. Engagées en 2007, les négociations n’ont réellement démarré que pendant les douze jours du sommet. Les Européens, qui supportaient jusque-là l’essentiel des efforts, sont désormais rejoints par les États-Unis – grâce au forcing de Barack Obama. Ce dernier propose que son pays adopte une loi prévoyant une réduction de 17 % des émissions de CO2 d’ici à 2020 (par rapport à 2005) et contribue au financement d’un fonds de soutien aux pays pauvres de 100 milliards de dollars. Mais cette loi doit être approuvée par le Congrès à Washington, lequel exige que la Chine fixe, elle aussi, un quota de réduction et, surtout, qu’elle se soumette à un contrôle international indépendant, ce que Pékin refuse catégoriquement…
ClimDev Africa, le poumon vert de la BAD
Première victime, l’Afrique, qui ne contribue que très peu à la pollution mondiale (4 % des émissions de CO2), a réclamé une limitation à 1,5 °C de la hausse de température (au lieu de l’objectif de 2 °C) et une aide destinée à développer les énergies propres, à protéger les forêts et à lutter contre la désertification. Selon Donald Kaberuka, le président de la Banque africaine de développement (BAD), le continent aura besoin de 40 milliards de dollars par an en moyenne entre 2010 et 2020. Le 14 décembre, il a annoncé, à Copenhague, la création d’un fonds d’investissement, ClimDev Africa, qui recevra la contribution de plusieurs donateurs. Se sont déjà engagés le Royaume-Uni, la Norvège, le Danemark, la Suède et Monaco. Et Kaberuka a fixé des priorités : sauver les forêts du bassin du Congo (200 millions d’hectares, le deuxième poumon vert de la planète après l’Amazonie) et le lac Tchad (qui a perdu 90 % de son eau depuis 1960), promouvoir des infrastructures résistantes aux changements climatiques, exploiter les potentialités du continent en énergie hydroélectrique, éolienne et solaire. Et, enfin, se doter de meilleurs instruments de prévision météorologique. On n’est jamais mieux servi que par soi-même !
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