Renaissance bamakoise
Salle mythique de Bamako fermée depuis près de quinze ans, le Soudan Ciné devrait rouvrir ses portes fin 2010. Grâce au Mauritanien Abderrahmane Sissako, à l’origine d’un ambitieux projet de réhabilitation.
Le Soudan Ciné de Bamako est fermé depuis une quinzaine d’années. Ses rangées de fauteuils bordeaux plongées dans la pénombre restent désespérément vides. La poussière s’est incrustée dans le tissu des quelque 400 sièges où les Bamakois venaient autrefois rêver grâce à la magie du septième art. Plus de westerns sur le grand écran, plus d’histoires d’amour, même plus de films pornos comme aux dernières heures de la salle. Pourtant, le Soudan Ciné n’est pas encore mort. Bientôt, si tout va bien, il accueillera de nouveau des centaines de spectateurs. Le cinéaste d’origine mauritanienne Abderrahmane Sissako (En attendant le bonheur, Bamako) est en grande partie à l’origine d’un ambitieux projet de réhabilitation, via son association Des cinémas pour l’Afrique.
Télévision collective
Il est peut-être anachronique de croire encore au cinéma sur grand écran à une époque où les séances de télévision collective et l’achat de vidéos, en ligne ou à la sauvette, ne cessent de se développer. Mais Sissako veut y croire. Pour lui, réhabiliter le Soudan Ciné, « c’est s’impliquer pour permettre une meilleure visibilité du cinéma africain ». Sans pour autant se perdre dans une programmation élitiste : « Il ne s’agit pas de proposer uniquement des films d’art et d’essai que seuls viendraient voir les expatriés. Il s’agit de recréer une salle pour les Bamakois. »
Comment s’y prendre pour réunir l’argent nécessaire ? L’association Des cinémas pour l’Afrique a symboliquement mis en vente les fauteuils élimés du cinéma au prix de 5 000 euros l’unité, dans l’espoir de lever 2 millions d’euros. Se sont déjà portés acquéreurs l’actrice française Juliette Binoche, la cantatrice Barbara Hendricks, CulturesFrance, Gaumont, Europa Cinemas et quelques autres. L’étude de faisabilité a été confiée à deux architectes spécialisés dans les salles de cinéma, Jean-Marc Lalo et Frédéric Namur, qui ont déjà travaillé sur la Cinémathèque de Tanger (Maroc) et le cinéma Ariana de Kaboul (Afghanistan). Le propriétaire actuel du bâtiment, le groupe malien Tomota (imprimerie, hôtellerie, BTP, agroalimentaire, etc.), a accordé un bail de cinquante ans pour un franc symbolique.
Bien entendu, le Soudan Ciné ne renaîtra pas dans sa forme ancienne. Deux espaces polyvalents pourront accueillir des projections numériques de type 2K, qui permettent de se passer de… bobines. Mais ils pourront aussi accueillir des spectacles, des séminaires, des conférences et des visioconférences. Doté en outre d’un bar et d’un espace de restauration, le Soudan Ciné aura pour vocation de devenir un vrai centre culturel. « Une fenêtre sur le monde et la diversité du cinéma », comme le martèle Sissako. Quand pourra-t-on s’asseoir sur des sièges flambant neufs pour se faire une toile ? Fin 2010.
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