Belgique : la vie sans lui

Après la nomination du Premier ministre Herman Van Rompuy à la présidence du Conseil européen, la tâche qui attend son successeur, le revenant Yves Leterme, s’annonce très, très compliquée.

Publié le 15 décembre 2009 Lecture : 3 minutes.

« Il doit apprendre La Brabançonne » (l’hymne national), mais aussi « faire preuve de discrétion », voire « s’adjoindre les services d’un grand communicateur »… Le 25 novembre, les journalistes flamands n’ont pas ménagé leurs conseils à Yves Leterme, de retour à la tête du gouvernement belge après la nomination d’Herman Van Rompuy à la présidence du Conseil européen. La vérité est que les Belges oscillent entre deux sentiments : la fierté de voir l’un des leurs présider aux destinées de l’Europe et l’amertume d’avoir perdu un Premier ministre « providentiel ».

Arrivé au pouvoir en décembre 2008, après vingt mois de crise politique, Van Rompuy avait su ramener la stabilité et mettre un bémol aux sempiternelles querelles intercommunautaires. Son calme, son sérieux et ses qualités de négociateur avaient fait oublier l’impétuosité et le radicalisme de son prédécesseur, un certain… Yves Leterme, grand spécialiste des bourdes à répétition : de l’invraisemblable confusion qu’il fit un jour entre La Brabançonne et La Marseillaise à la révélation de ses entretiens secrets avec le roi, en passant par sa comparaison – grotesque – entre la RTBF (la télé publique belge) et la Radio des Mille Collines, porte-voix des génocidaires rwandais.

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Réforme institutionnelle

Mais le leader du CD&V, le parti chrétien-démocrate et flamand, a gagné les élections législatives de juin 2007. Et donc le droit de gouverner. À l’époque, il n’avait pris ses fonctions de Premier ministre qu’en mars 2008, après 233 jours d’âpres négociations sur la composition et le programme du gouvernement. Quatre mois plus tard, incapable de faire travailler ensemble Flamands et Wallons à une réforme des institutions, il avait été contraint de démissionner. Remis en selle par le roi, il avait rechuté en décembre, accusé d’avoir fait pression sur la justice pour favoriser le rachat de la banque Fortis par sa consœur française BNP Paribas. Blanchi quelques mois plus tard, il s’était vu offrir le ministère des Affaires étrangères. Il s’en était jusqu’ici plutôt bien sorti, mais la difficulté de la tâche était évidemment sans commune mesure avec celle de chef de gouvernement d’un pays au bord de l’éclatement…

À Bruxelles, beaucoup s’inquiètent aussi de son état de santé après l’hémorragie interne dont il a été victime en février 2008. Car Yves Leterme va avoir besoin de toutes ses forces pour poursuivre les réformes et amortir les chocs de la crise économique.

Mais c’est surtout sur le dossier de la scission de l’arrondissement électoral et judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde, à cheval sur les régions de Flandre et de Bruxelles-Capitale, qu’il est attendu. Les Flamands exigent depuis longtemps l’éclatement dudit arrondissement ; les francophones s’y opposent, craignant d’y perdre leurs avantages.

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« J’appelle tous les partis concernés à concrétiser leur engagement pour que des débats sereins aboutissent à une solution équilibrée. Il va de soi que retenue et discrétion sont indispensables. Le gouvernement espère aboutir à un accord au printemps 2010, suivi de sa mise en œuvre », a expliqué Leterme lors de sa déclaration de politique générale.

Pour l’aider, le roi a nommé Jean-Luc Dehaene, dit « le plombier », au poste de commissaire royal chargé des réformes institutionnelles. Cet ancien Premier ministre sera chargé de proposer des solutions aux responsables politiques.

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Leterme aurait-il changé ? Il s’applique désormais à paraître humble, à l’écoute, appliqué, et prétend avoir appris de ses échecs. Mais sans doute devra-t-il se méfier de son entourage. À preuve, sa déclaration de politique gouvernementale s’est retrouvée sur Internet plusieurs heures avant sa lecture devant les élus de la nation. Ce qui lui a valu de vives critiques de la part des parlementaires. Quoi qu’il en soit, le Premier ministre est condamné à réussir. Faute de quoi la présidence belge de l’Union européenne, au second semestre 2010, risque de tourner au calvaire.

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