Une taupe à l’état-major

Il y a une taupe dans l’armée turque. Bien informée et d’humeur épistolière. Le 23 octobre, un officier anonyme envoie au bureau du procureur général d’Istanbul un document très compromettant pour l’état-major : l’original du « plan de lutte contre les réactionnaires », un complot éventé en juin dernier et destiné à déstabiliser, puis à renverser le gouvernement AKP. Ce dernier avait aussitôt porté l’affaire devant la justice. Signataire présumé du document, le colonel Dursun Çiçek a été emprisonné le 11 novembre. Mais la responsabilité ne s’arrête pas à son niveau. Alors qu’Ilker Basbug, le chef d’état-major, avait qualifié la copie du plan de « chiffon de papier », la production tardive de l’original place la hiérarchie militaire dans une situation délicate.

Dans sa lettre, l’officier révèle que l’instigateur du complot serait le général Hasan Igsiz, à l’époque numéro deux de l’armée, et divulgue l’identité de six de ses collègues qui auraient été chargés de supprimer les preuves.

Le 4 novembre, dans une deuxième lettre envoyée à plusieurs journaux, l’informateur précise que l’armée anime quarante-deux sites Internet destinés à la « guerre psychologique » contre les « réactionnaires » [islamistes], les « séparatistes » [kurdes] et, de manière générale, les « ennemis » [de l’état-major]. Et que, par ailleurs, elle surveille de près quatre cents sites turcs et étrangers. Parmi les catégories jugées suspectes figurent des sites… proeuropéens !

Pour sa défense, l’armée soutient qu’elle a agi sur la base d’une directive du précédent gouvernement, datant de 2000. L’ennui, c’est que l’on n’en a pas retrouvé trace…