Délit de boisson

Après la journaliste Loubna Ahmed al-Hussein, condamnée à quarante coups de fouet en juillet dernier avec douze autres femmes pour avoir porté un pantalon, un espoir du football est à son tour menacé de la même peine. Le 10 novembre, le tribunal de Khartoum a condamné le Nigérian Stephen Worgu, milieu de terrain d’Al-Merreikh, l’un des deux clubs de la ville d’Omdurman, à recevoir le même châtiment. Il avait été arrêté au volant de sa voiture, le 21 août, en état d’ébriété.

Ce footballeur de 20 ans, acheté 2,6 millions de dollars (1,7 million d’euros) au club nigérian d’Enyimba en octobre 2008, se serait bien contenté de la contravention infligée par le tribunal : 20 dollars pour avoir bu de l’alcool et 80 autres pour avoir conduit en état d’ivresse. Mais l’article 78 du code pénal soudanais, qui interdit la consommation d’alcool, prévoit un châtiment corporel en plus de l’amende. Soutenu par son club, Worgu a fait appel de sa condamnation.

L’affaire fait grand bruit. L’arrivée de ce joueur au Soudan n’était pas passée inaperçue. Vainqueur de la Premier League nigériane à l’âge de 16 ans, meilleur buteur de la Champions League africaine en 2008 avec treize buts, Worgu est l’un des plus gros transferts jamais enregistrés sur le continent. L’ex-international nigérian des moins de 20 ans était annoncé comme une future star du championnat soudanais. Il a vite déchanté…

Celui qui avait préféré Al-Merreikh à un club égyptien ou tunisien ne s’est jamais fait à la vie soudanaise. Il a fallu attendre plusieurs mois pour qu’il marque son premier but dans le championnat et, avant sa mésaventure, son président de club avait annoncé qu’il cherchait à le vendre « en Europe ». « J’ai du mal à m’adapter. La culture, la religion, la langue, tout est différent », avait-il déclaré à la BBC en avril, avant de lancer cette parole prémonitoire : « Ils pratiquent la charia, et cela m’affecte, parce que je ne me sens pas libre de faire ce que je veux. »