Crise : l’Afrique prend les commandes
Jusqu’à présent, les Africains ont vu les crises mondiales se succéder sans réagir. Ils étaient sans pouvoir et sans voix. Le poids économique de leur continent était négligeable, leurs partenaires se limitaient à l’Union européenne et aux institutions multilatérales (FMI, Banque mondiale). Bref, ils n’avaient d’autre choix que de tendre la main, et d’obtempérer… Avec la dernière crise, qui a éclaté en septembre 2008, les choses semblent – enfin – changer pour de bon.
Ce changement, dont on avait senti les prémices avec la participation africaine aux sommets du G20, est apparu au grand jour lors du premier forum africain sur les effets de la crise mondiale, à Addis-Abeba. Du 11 au 13 novembre, la capitale éthiopienne a réuni l’élite du continent et de la diaspora – près de 400 experts de toutes disciplines – pour évaluer l’impact de la crise et réfléchir aux moyens de promouvoir le développement durable et l’intégration sur le continent.
Sous l’impulsion de la Banque africaine de développement (BAD), de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA) et de l’Union africaine (UA), ce forum a galvanisé les esprits et provoqué des discussions d’une franchise jamais atteinte. Plus personne n’est désormais indifférent au sort de ce continent qui comptera 2 milliards d’habitants en 2050, deux fois plus qu’aujourd’hui, et dont la superficie est trois fois supérieure à celle des États-Unis ou de la Chine.
Jean Ping, le président de la Commission de l’UA, l’a judicieusement rappelé : « La crise est salutaire pour tout le monde. On sait désormais que le marché capitaliste ne va pas tout résoudre et que rien n’est irréversible. Personne ne pourra plus nous dicter ce que nous devons faire. Mais notre seule voie de salut est dans le regroupement de nos forces et de nos potentialités naturelles. » Dans un discours flamboyant, il a réaffirmé que « l’Afrique doit d’abord compter sur elle-même » et – allusion aux accords de coopération avec la Chine, l’Inde ou l’Amérique latine – qu’elle a non seulement « raison de diversifier ses partenaires », mais que « c’est son droit le plus absolu ».
Pour Donald Kaberuka, le président de la BAD, l’Afrique devrait commencer à sortir de la crise dès 2010, avec un taux de croissance de 4 %, contre 1,7 % cette année. « Pour créer des emplois et réduire la pauvreté, nous avons besoin de 7 % de croissance, a-t-il tempéré. Ce n’est pas une tâche impossible, le continent est un gisement de matières premières. C’est aussi un marché de plus de 1 milliard de consommateurs. »
Le danger, a souligné Abdoulie Janneh, secrétaire exécutif de la CEA, réside dans la « mono-économie de l’extraction des matières premières et dans la croissance sans emploi ». « Imaginons l’Afrique de demain, a conclu le Premier ministre éthiopien, Mélès Zenawi, très en verve. Une Afrique capable de trouver une réponse globale à la crise et aux changements climatiques, une Afrique capable d’attirer les investissements, une Afrique qui ne se contenterait plus de gérer une pauvreté chronique… Pour y arriver, il faudra plus d’un forum de ce genre ! »
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