Cemac : pénalisée par les incertitudes sur le pétrole

Publié le 9 novembre 2009 Lecture : 5 minutes.

Quand le pétrole va, tout va. Et inversement. Le Gabon, qui a vu sa production reculer de 2,5 % l’an passé, s’est contenté d’un taux de croissance de seulement 1,9 % en 2008. Après une récession de – 2,5 % en 2007, la croissance du PIB du Congo s’est envolée de 5,2 % en 2008 grâce à la hausse de la production… d’or noir du pays (+ 6,4 %). Scénario identique en Guinée équatoriale, avec une croissance de 16,8 % en 2008. Cette performance résulte de l’expansion rapide de la production de gaz et du dynamisme du secteur pétrolier. Des hydrocarbures qui représentent 91,2 % du PIB du pays. Mais selon la Banque des États de l’Afrique centrale (Beac), la situation macroéconomique du pays s’est dégradée en 2009 avec la baisse en début d’année des cours du pétrole et du gaz…

La Guinée équatoriale demeure le premier producteur de pétrole de la zone franc (17,4 millions de tonnes), devant le Gabon (11,8), le Congo (11,7), le Tchad (6,5) et le Cameroun (4,3). Mais malheureusement pour les économies de la Communauté économique et monétaire d’Afrique centrale (Cemac), largement tributaires des aléas des cours de l’or noir (le pétrole représente près de 45 % du PIB nominal de la zone), la période n’est pas des plus fastes. La croissance du PIB de la Cemac a ainsi glissé de 4,6 % en 2007 à 4 % en 2008. Cette érosion s’est déroulée dans un contexte de baisse de la production (– 1,2 % en 2008 et – 4,4 % en 2007) et de dépendance accrue. La part des hydrocarbures dans les recettes budgétaires est ainsi passée de 67 % en 2007 à 73 % l’an passé, grâce à la hausse de 24,4 % des prix moyens à l’exportation.

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En 2009, l’activité économique des pays de la Cemac accusera encore le coup avec une croissance du PIB de 2,1 % seulement, d’après le dernier rapport de la zone franc de la Banque de France publié fin septembre. Plus pessimiste, le FMI prévoit un taux de 1,7 % pour l’année à venir. La projection de la Banque de France se fonde sur un recul de la production pétrolière (– 1,9 %). Mais la tendance à la remontée des prix de l’or noir amorcée à la fin du premier semestre 2009 laisse espérer, si elle se confirme, une révision à la hausse de ces prévisions. De son côté, le Cameroun, qui s’arroge plus du tiers du PIB de la Cemac, a connu une progression stable de son économie (3,9 % en 2007 et 3,5 % en 2008), tandis que la Centrafrique connaissait un ralentissement de sa machine (3,6 % en 2007 et 2 % en 2008), et le Tchad, confronté à un environnement sécuritaire instable et à une baisse de la production pétrolière, a vu son PIB se réduire de 0,8 % l’an dernier.

La production de bois tropicaux s’est effondrée

L’année 2009 sera-t-elle bien l’année de la reprise ? « Depuis le mois de mai dernier, nous avons retrouvé un rythme d’activité normal au Cameroun, que confirment les services fiscaux et douaniers », précisait Essimi Menye, le ministre des Finances et président en exercice du comité ministériel de l’Union monétaire de l’Afrique centrale (Umac), lors de la dernière réunion de la zone franc, le 29 septembre 2009. Cela reste à confirmer. Car les économies des pays de la Cemac sont aussi tributaires de l’évolution de la demande et des prix des produits d’extraction minière, des produits agricoles et des bois tropicaux. Le pétrole brut et le bois représentent respectivement 82 % et 6,1 % des exportations de la zone Cemac.

Au Cameroun, les cultures de rente ont connu une croissance négative (– 0,2 %) l’an passé. Les volumes des principaux produits ont reculé, le café (– 4 %) et le coton (– 5 %, après une chute de 37 % en 2007), à l’exception des productions de caoutchouc naturel (+ 2 %), de cacao (+ 1,9 %) et de bananes (+ 1 %). Au Congo, la production de bois tropicaux s’est effondrée de 20 % au cours du second semestre 2008, conséquence de la chute sévère des prix à l’exportation des grumes (– 30,3 %) au cours de la même période. Une activité qui est encore malmenée cette année. Au Gabon, la filière forestière, deuxième employeur formel avec 10 000 salariés, a noté une baisse de la production (– 15 %). Quant à la Guinée équatoriale, la chute de la demande en bois tropicaux de ses principaux clients (Chine, États-Unis et France) a également fait chuter la production de grumes de 15 % l’année écoulée.

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Le secteur des mines n’est pas en meilleure forme. Au Gabon, l’extraction de manganèse de la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog) a diminué de 3,2 millions de tonnes (– 3 % par rapport à 2007) en raison de la baisse de la demande chinoise. Rien que sur les deux derniers mois de 2008, les volumes exportés ont fondu de moitié, à 300 000 tonnes. Ce qui a conduit la Comilog à cesser momentanément ses activités. Malgré ce coup dur, le pays a quand même profité de l’explosion du prix du minerai à l’exportation (+ 140 % en moyenne annuelle).

Dans les secteurs industriels, les pays connaissent des fortunes diverses. Représentant 19,4 % du PIB, l’industrie camerounaise n’est pas vraiment flamboyante, hormis dans les secteurs agroalimentaire et pharmaceutique. Dans le bâtiment, la croissance a été faible à cause du retard dans le lancement des projets d’infrastructures et l’incapacité de la filière ciment à suivre la demande. La contribution au PIB des secteurs de l’électricité, du gaz et de l’eau a été nulle. L’extension de la capacité de production d’électricité de la centrale de Kribi n’est toujours pas réalisée. Dans un tel contexte, le Cameroun connaîta une croissance de seulement 2,7 % en 2009.

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Relance des investissements

De son côté, le Congo devrait, d’après les prévisions de la Beac (juin 2009), enregistrer une forte accélération de sa croissance cette année (6,8 %). Elle résulterait bien sûr de la forte reprise de la production d’hydrocarbures (+ 17,2 %) en 2009, mais également du lancement d’importants projets de construction : usine de potasse de Mengo et modernisation du terminal à conteneurs du port de Pointe-Noire.

En Guinée équatoriale, le secteur de la construction reste très dynamique. Il bénéficie de l’augmentation des budgets d’investissements publics (infrastructures de transport, logements…). Les travaux d’extension du maillage routier doubleront le réseau en 2018 (1 000 kilomètres de plus), la modernisation du port de Malabo et la construction du quartier d’affaires « Malabo II » en 2010 ont soutenu l’activité. La mission du FMI en mars 2009 à Malabo a rappelé la nécessité pour le pays de diversifier son économie et ses sources d’exportation pour être moins tributaire du pétrole. Il n’empêche, selon la Banque de France, la croissance du secteur non pétrolier de la Cemac, ramené à 2,6 % en 2009, pourrait être la plus faible enregistrée par la zone depuis 1999 ! Les impacts de la crise ne sont pas tous dissipés.

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