Renouveau algérien
Bande dessinée: oublier Tintin
La BD algérienne, qui pleurait depuis plus de vingt ans son âge d’or révolu des années 1960-1970, refait des bulles. Une dizaine d’albums (dont une adaptation d’un roman policier de Yasmina Khadra, Le Dingue au bistouri) ont été publiés cette année, alors qu’aucune création n’avait vu le jour depuis… 1987. Signe annonciateur de ce renouveau : en 2003, l’Enag, maison d’édition publique, avait réédité une quarantaine d’anciens albums (Les Aventures de Sindbad le marin, de Mahfoud Aïder, La Boîte à chique, de Slim…) qui ont fait cet âge d’or.
Ce réveil est en grande partie lié au Festival international de la bande dessinée d’Alger (Fibda), qui a vu le jour l’an dernier, et dont la deuxième édition s’est tenue du 14 au 18 octobre. « Nous voulons créer une dynamique et relancer l’industrie de la BD », explique Dalila Nadjem, commissaire de l’événement et directrice de la maison d’édition Dalimen. Surtout, « ce festival veut réconcilier l’ancienne génération avec la nouvelle, très prometteuse ». Les Slim, Haroun, Melouah, Aïder, Le Hic… semblent, en effet, avoir trouvé une relève avec Tahar Aidaoui, Amine Benabdelhamid, alias « Nime » (tous deux lauréats du concours Jeunes talents du Fibda 2009), Samir Toudji, alias « Togui »… Une nouvelle génération qui a été « trop longtemps inexistante », commente Slim, auquel le Fibda a rendu hommage via une exposition de ses dessins, dont une première version, inédite, de l’inénarrable Bouzid et de sa dulcinée Zina.
Pourquoi cette éclipse ? « Il y a des circonstances atténuantes », explique Dalila Nadjem. Façon pudique de désigner la montée de l’islamisme à la fin des années 1980 et la décennie noire qui a ensanglanté ensuite le pays. Du coup, la plupart des signatures reconnues se sont effacées, les unes dans l’exil, les autres abandonnant la partie faute de support. « La diffusion est un gros problème », insiste Slim, qui a d’ailleurs trouvé la parade. Il s’est associé à un éditeur sur Internet, lulu.com, qui lui permet de rééditer ses albums sur commande (pour un prix compris entre 11 et 15 euros).
Trop frileux, les éditeurs algériens ? L’avis fait consensus. Et Slim d’enfoncer le clou : « Ce pays n’aime pas la BD ! » Pourtant, nuance Dalila Nadjem, « les choses bougent. Aujourd’hui, quelques éditeurs prennent des risques et ont plus d’audace ». Et d’autres émergent, comme la jeune maison Z-Link, lancée par Salim Brahimi, qui édite Laabstor, une revue consacrée aux jeux vidéo et… au manga algérien. De son côté, le Fibda publie le numéro zéro d’un fanzine, El Bendir, appelé à devenir mensuel. Des initiatives salutaires et à encourager .
Vignette extraite de Zid Ya Bouzid, première histoire de Bouzid, de Slim (1969)
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