Chantage des bailleurs de fonds

Un contrat signé en avril 2008 entre la RD Congo et des entreprises chinoises altère les relations avec le Fonds monétaire international et bloque la signature d’un accord sur les politiques économique et financière de l’état.

Publié le 29 octobre 2009 Lecture : 4 minutes.

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RD Congo: Désirs d’avenir

Sommaire

Le long feuilleton du bras de fer engagé avec le Fonds monétaire international (FMI) prendra-t-il fin bientôt ? Après le passage d’une mission du FMI à Kinshasa, au mois d’août dernier, les conclusions de cette dernière permettaient de croire à la signature imminente d’un accord formel entre les deux parties. La dernière étape à franchir était donc la France, où la RD Congo avait rendez-vous, le 15 septembre, avec ses créanciers traditionnels du Club de Paris, mais la réunion a été reportée au 15 octobre. En outre, la rencontre prévue en septembre avec le FMI et la Banque mondiale est, elle aussi, renvoyée au mois de novembre. Raison invoquée ? Le retard pris dans la signature de l’avenant au contrat sino-congolais, pomme de discorde entre la RD Congo et le FMI depuis de longs mois.

Les relations formelles avec le FMI, concrétisées par la signature, en 2002, d’un accord au titre de la Facilité pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance (FRPC), ont été interrompues en mars 2006, en raison notamment d’importants dérapages budgétaires lors de la transition. Reprises en 2008, les discussions ont très vite buté sur le contrat négocié en 2007 et signé en avril 2008 entre le ministère des Infrastructures, des Travaux publics et de la Reconstruction, et un groupement d’entreprises chinoises, formé de la China Railways, de Sinohydro et d’Eximbank. Le contrat prévoyait l’octroi à la RD Congo d’un prêt d’environ neuf milliards de dollars : six milliards pour financer, en deux phases, la réalisation d’infrastructures de base et trois milliards pour relancer le secteur minier dans le cadre d’un joint-venture avec la Gécamines, ex-fleuron de l’industrie minière congolaise.

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C’est principalement sur la clause de garantie de l’État congolais, qui s’était engagé à octroyer de nouvelles concessions minières et des avantages fiscaux au groupement d’entreprises chinoises si les revenus tirés des mines n’étaient pas à la hauteur des attentes, que les discussions ont achoppé. Pas question pour le FMI, en effet, que le pays emprunte encore neuf milliards alors qu’il négocie un allégement de sa dette publique extérieure, estimée à quelque 12 milliards de dollars.

Optimisme de mise

Après d’âpres négociations, les deux parties ont fini par trouver un accord sur deux points fondamentaux : les Chinois ont accepté de lever la garantie de l’État sur le projet minier, qui devient ainsi un simple projet commercial, et la deuxième phase du volet infrastructures a été annulée. Donc, de 9 milliards, le contrat a été ramené à 6 milliards. Un endettement soutenable pour le pays. Seule la garantie de l’État sur le volet infrastructures a été maintenue, car c’est l’État qui est bénéficiaire de ces équipements. Mais elle ne prendra effet que dans vingt-cinq ans.

L’optimisme était donc de mise à Kinshasa à la fin du mois d’août dernier. Il ne restait plus qu’à franchir le cap du Club de Paris, qui représente environ 60 % de l’en-cours total de la dette extérieure du pays, avant de conclure l’accord tant attendu. Une étape incontournable pour que le FMI puisse statuer sur la concessionnalité et la viabilité de la dette dans son ensemble. C’était sans compter avec la partie chinoise, qui n’avait pas signé l’avenant à la mi-septembre. Toutefois, c’est promis, elle va le faire, a affirmé son ambassadeur en RD Congo, Wu Zexian. Néanmoins, au début d’octobre, seule une des entreprises avait paraphé l’avenant.

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Du coup, c’est la course contre la montre pour respecter le timing. Car tout retard pris avec le FMI prive non seulement la RD Congo de 600 millions de dollars, déblocables dès la signature de l’accord, sur les 3 milliards prévus par la FRPC, mais il fait également reculer l’échéance de l’atteinte du point d’achèvement de l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE), sésame pour l’allégement de la dette publique.

Le déblocage de la situation et la signature d’un accord avec le FMI ne tireront pas le gouvernement congolais de toutes ses peines. En effet, il devra respecter un certain nombre de critères quantitatifs – portant notamment sur le montant des avoirs extérieurs et intérieurs nets et du crédit net à l’État –, finaliser des réformes structurelles, dont celle des entreprises d’État et la restructuration de la BCC, qui prévoit sa recapitalisation, et réaliser divers autres repères, dont la mise en place d’une unité spécialisée pour l’imposition des sociétés minières, au sein de la Direction générale de l’économie.

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La croissance relancée

Sur le plan macroéconomique, l’avenir est toutefois à l’optimisme. Certes, la RD Congo a été frappée de plein fouet par la crise financière internationale, qui l’a obligée à revoir à la baisse le taux de croissance. Ce dernier, prévu à 10 % en 2008, s’est finalement établi à 5,2 %. Et pour 2009, les projections ont été révisées, passant de 6 % à 2,7 %. Mais la croissance devrait être portée à 6 % en 2010, tirée notamment par le BTP, grâce aux grands chantiers d’infrastructures.

L’année 2010 sera-t-elle l’occasion d’un nouveau départ pour la RD Congo, avec l’effacement de près de dix milliards de dollars de dette publique ? C’est à espérer. Force est de constater que six ans se sont déjà écoulés depuis le franchissement du point de décision de l’initiative en faveur des PPTE en juillet 2003. Un beau record !

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