Congo bashing

FRANCOIS-SOUDAN_2024

Publié le 29 octobre 2009 Lecture : 2 minutes.

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RD Congo: Désirs d’avenir

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La République démocratique du Congo a ceci d’irremplaçable pour les médias et les ONG du Nord qu’elle offre une source quasi inépuisable de clichés réducteurs, motifs d’indignation, reportages chocs, rapports alarmistes et autres photos coup-de-poing sur la misère du monde. Pas une semaine sans son lot d’exactions au Sud-Kivu, de viols dans le Haut-Uele, de bavures des services spéciaux à Kinshasa, d’affaires de corruption au sein de la magistrature, pas un jour sans un cas de racket policier. Bref, il n’y a qu’à se baisser pour ramasser une bonne histoire qui saisira aux tripes les âmes sensibles. Raconter la souffrance quotidienne des Congolais peut même rapporter gros : un prix Pulitzer ou Albert-Londres, par exemple. Que l’on soit humanitaire ou journaliste, on ne revient jamais de ce pays de la démesure les mains vides…

Le problème, évidemment, dans cet exercice de « Congo bashing » (que l’on pourrait traduire par « critique permanente et systématique ») est que tout élément à décharge, ou tout simplement explicatif, de la situation actuelle, est a priori écarté. Au risque de paraître politiquement incorrect, certaines évidences méritent pourtant d’être énoncées. La première est qu’on ne sort pas de trente ans de dictature et d’une décennie de guerre sans que tout – y compris la façon d’être et de penser des Congolais – soit à reconstruire. La deuxième est que, si la RD Congo est aujourd’hui en paix avec tous ses voisins, c’est à Joseph Kabila qu’elle le doit. La troisième est que la Banque mondiale et le FMI, qui se sont livrés sur Kinshasa à un véritable chantage afin que le fameux prêt chinois soit révisé d’un tiers à la baisse, portent une lourde part de responsabilité dans l’écrasante dette extérieure, contractée pour l’essentiel sous Mobutu avec leur bénédiction, et qu’ils ne l’assument pas. La quatrième enfin est que, pour la première fois depuis longtemps, une réponse est apportée en ce moment au défi fondamental : comment rétablir le contrôle de l’État sur toute l’étendue du territoire ? Comment déboucher les artères de ce grand corps malade ? Comment désenclaver un arrière-pays dont certaines zones sont revenues à l’état précolonial ? Tel est l’objectif, ambitieux certes, problématique sans doute, mais profondément raisonnable des « cinq chantiers de la République » dont certains ont déjà commencé – notamment le long de la mythique RN 1, qui relie le Bas-Congo au Katanga.

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Jamais, en un demi-siècle d’histoire tourmentée, malgré les guerres civiles et les multiples ingérences extérieures, la volonté des Congolais de vivre ensemble ne s’est démentie. Un nationalisme d’autant plus méritoire qu’il repose avant tout sur le rêve de ce que leur pays pourrait être, avec toutes les richesses potentielles de son sous-sol. Réconcilier cet espoir avec la réalité passe avant tout par la reconquête de l’espace commun. Ce n’est qu’à ce prix que l’on pourra atténuer la souffrance des Congolais, attendre de chacun d’entre eux qu’il s’engage pour le bien de tous et ôter aux adeptes du Congo bashing quelques motifs de satisfaction.

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