Radars brouillés
En excluant Israël d’une série d’exercices militaires aériens conjoints qui devaient se dérouler du 12 au 23 octobre au-dessus des plaines de Konya, comme chaque année depuis 2001, la Turquie n’a pas seulement mis du plomb dans l’aile de l’« Aigle d’Anatolie » (nom de l’opération). Elle s’est aussi attiré la réprobation de Washington et de ses alliés de l’Otan, qui se sont retirés des exercices en signe de solidarité avec Tel-Aviv. Surtout, la Turquie a donné un nouveau coup de canif à l’amitié qui la lie à Israël et à leur accord de coopération militaire de 1996.
Pour l’État hébreu, qui souffre de l’exiguïté de son territoire, l’utilisation de l’espace aérien turc est vitale pour ses exercices de simulation. Pour Ankara, les livraisons d’armes israéliennes sont tout aussi vitales dans sa lutte contre les séparatistes kurdes du PKK. Or, malgré ces intérêts réciproques, le climat a changé depuis la formation, en 2002, en Turquie, d’un gouvernement islamo-conservateur qui s’est rapproché des pays arabes et s’est réconcilié avec l’Iran et la Syrie. Porté par une opinion pro-palestinienne, le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan qualifie, en 2004, les assassinats ciblés de Cheikh Yassine et d’Abdelaziz al-Rantisi, deux leaders du Hamas, de « terrorisme d’État ». Deux ans plus tard, il provoque la fureur des Israéliens en acceptant la visite d’une délégation du Hamas à Ankara. Et en janvier dernier, interpelle violemment Shimon Pérès, le président israélien, à propos de l’opération « Plomb durci » à Gaza, dénonçant des « actes barbares ». Résultat : la médiation qu’Erdogan menait en coulisses entre la Syrie et Israël et qui a été rompue, fin 2008, en raison de l’intervention à Gaza, n’est pas près de reprendre. Mais l’annulation d’« Aigle d’Anatolie » révèle aussi un malaise plus grave et totalement nouveau. Ce n’est plus seulement le gouvernement mais le tout-puissant état-major turc qui manifeste aujourd’hui sa colère. Elle serait due, selon un responsable de l’armée de l’air turque, aux retards de livraison « incessants et injustifiés » de drones Heron israéliens…
La Matinale.
Chaque matin, recevez les 10 informations clés de l’actualité africaine.
Consultez notre politique de gestion des données personnelles
Les plus lus
- Ilham Aliyev, l’autocrate qui veut « dégager » la France d’Afrique
- Carburant en Afrique : pourquoi les exportateurs mondiaux jouent des coudes pour a...
- De Yaoundé à l’Extrême-Nord : voyage sur les routes de l’impossible
- En Guinée, Mamadi Doumbouya élevé au grade de général d’armée
- Au Kenya, l’entourage très soudé de William Ruto