Edem Awumey : espoir togolais

Edem Awumey publie Les Pieds sales. Un roman sur l’exil et l’errance salué par l’académie du Goncourt.

Publié le 14 octobre 2009 Lecture : 2 minutes.

Edem Awumey a une voix qui ressemble à son écriture : à la fois douce et décidée. Voilà peut-être une des raisons qui ont amené le jeune auteur, né en 1975 au Togo, à faire partie de la première sélection du prestigieux prix Goncourt. Son second roman, Les Pieds sales, a été défendu et soutenu, dit-on, par l’écrivain marocain Tahar Ben Jelloun. Il y raconte les pérégrinations, dans un Paris hostile et froid, d’Askia, un jeune Africain qui s’est mis en tête de retrouver son père, disparu un matin.

Askia a quitté l’Afrique, sa mère et son travail dans « la Cellule », « structure officieuse de renseignement, milice spécialisée dans l’enlèvement, la torture et le meurtre »… Il semble porter la « malédiction de la famille », celle « d’enchaîner les départs, de marcher des milliers de chemins jusqu’à l’épuisement et la mort ». Celle d’être un pied sale, à force de courir les routes. « Le livre est né de différents voyages et rencontres, explique Edem Awumey. J’ai visité Tanger et j’y ai croisé des candidats au départ, de jeunes Marocains mais aussi des Africains de toutes nationalités, remplis de douleur et de frustrations, qui attendaient de traverser le détroit de Gibraltar. Un vieil homme est venu vers moi pour me proposer le passage : il ne pouvait pas imaginer qu’avec ma peau noire je sois un simple touriste… Comme si l’exil et l’errance étaient inscrits sur mon visage. J’ai donc voulu aborder ces sujets. »

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Edem Awumey évoque aussi le racisme (l’ombre menaçante d’un groupe de skinheads plane tout le long du livre) et la difficulté de vivre dans « une ville de Babel où les gens se côtoient sans se toucher ».

Très jeune, Edem Awumey a su qu’il voulait écrire. Après une maîtrise de lettres à Lomé, il décroche en 2000 une bourse d’écriture de l’Unesco qui le mène en France. Il y passe une thèse sur les écritures de l’exil et travaille sur l’œuvre de Tierno Monénembo. « L’écriture est comme une drogue pour moi. J’ai commencé à écrire alors que j’étais adolescent, j’ai publié une nouvelle dans Revue noire à 22 ans. J’écris tous les jours, dans ma tête, partout où je suis. » Il s’installe en 2005 au Québec. « Je voulais voir autre chose, partir à la découverte de ce grand village « gaulois » qui résiste à l’envahisseur anglophone. » Le jeune auteur habite à Gatineau, à deux heures de Montréal, à la frontière des provinces de Québec et de l’Ontario. La géographie a son importance. « J’enseigne le français à Ottawa et, chaque matin, je traverse le pont qui s’appelle Alexandra. C’est beau non ? Même si je ne retourne pas plus d’une fois par an au Togo, j’ai la chance, par le biais de l’écriture, de revenir en Afrique tous les jours… »

Un va-et-vient qui se retrouve dans ses ouvrages. « Quand on termine un livre, le prochain est déjà en vous, et demande qu’on lui donne vie. Mon premier roman, Port-Mélo [2006, grand prix littéraire de l’Afrique noire, NDLR], s’intéressait à l’Afrique. Le deuxième se passe à Paris. Il est fort possible que le troisième se penche sur ces grands espaces d’Amérique du Nord… Oui, j’ai besoin d’espace pour créer des personnages. »

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