Deux tours pour un président
Directeur-résident de l’Institut électoral de l’Afrique australe (Eisa), Kinshasa, RD Congo
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Dans tout le débat précédant l’élection présidentielle gabonaise, aucune critique n’a été émise, ou presque, sur le scrutin majoritaire à un tour. L’on est tenté de croire que tous les candidats ont volontairement fermé l’œil sur cet aspect de la loi électorale. Ils ont sans doute espéré bénéficier de ce système de majorité simple qui permet au gagnant de ne pas s’encombrer d’alliances politiques et d’un gouvernement consensuel. En tout cas, l’émiettement des voix représente un indéniable avantage pour le candidat « favori ».
Mais toute démocratie qui se respecte adopte un système de majorité absolue (ou à deux tours) à l’élection présidentielle, car le futur président doit jouir d’une solide légitimité populaire. En plus, ce type de scrutin contraint les partis politiques à former des coalitions, même « contre-nature », et favorise l’émergence d’un système de partis.
Dans le cas américain, le système des primaires, puis des élections échelonnées, régionales et progressives jusqu’au niveau national, contribuent déjà à établir la légitimité des candidats et à montrer que la victoire ne revient qu’à celui qui aura gagné la majorité des grands électeurs. Et si le système à deux tours n’y est pas appliqué dans sa forme classique, il l’est, à peu de choses près, dans son décompte mathématique.
L’opposition gabonaise a payé cher le fait de n’avoir pas su imposer au pouvoir central un système électoral majoritaire à deux tours. Car si elle a en théorie remporté l’élection avec environ 58 % des suffrages, elle a « perdu » le pouvoir, même si elle ne l’a jamais eu et, probablement, ne l’a jamais voulu. Fait encore plus curieux, à l’heure des remords et des plaintes, elle n’évoque même pas ce système électoral odieux. Seule l’Union des populations du Cameroun (UPC) réclame, depuis le 17 septembre, l’adoption de la majorité absolue pour la présidentielle camerounaise. Et pendant ce temps, les rumeurs font entendre que le Sénégal voudrait prendre le chemin inverse, de la majorité absolue à la majorité simple. Heureusement, ce ne sont que des rumeurs… Pour l’instant.
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