Barenboïm, dix ans sans fausse note

Jusqu’à la fin de l’année, l’orchestre créé et dirigé par l’Israélo-Argentin Daniel Barenboïm fête ses 10 ans. Un ensemble qui réunit de jeunes concertistes de l’État hébreu, de Palestine et des pays du Moyen-Orient.

Publié le 29 septembre 2009 Lecture : 2 minutes.

Lorsqu’il se produira salle Pleyel à Paris, le 29 septembre, à la tête de l’orchestre de la capitale française, le chef Daniel Barenboïm se concentrera sur le programme ambitieux de cette soirée consacrée à Chopin et à Berlioz. Il aura aussi, plus qu’à l’accoutumée, une pensée pour l’orchestre qu’il a fondé avec son ami palestinien Edward Saïd, le West-Eastern Divan Orchestra (Wedo). Le maître argentin, qui possède également la nationalité israélienne et un passeport palestinien, célèbre cette année le dixième anniversaire de cet ensemble réunissant Arabes et Israéliens.

C’est en août 1999, alors qu’il participe à une manifestation culturelle à Weimar, que l’idée d’un tel ensemble germe. Capitale de la musique européenne, la ville allemande est à quelques kilomètres du camp de Buchenwald. Il décide avec Edward Saïd de rassembler des jeunes concertistes originaires de l’État hébreu, de Palestine et des pays du Moyen-Orient. Objectif ? : « Accroître le dialogue interculturel et œuvrer au rapprochement entre Israéliens et Palestiniens. »

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Des centaines de musiciens arabes se portent candidat. Les premières sessions se déroulent à Weimar et à Chicago avant que le Wedo, dont le nom est tiré du recueil de poèmes de Goethe West-Eastern Divan (traduit en anglais), ne prenne ses quartiers d’été, à partir de 2002, dans la banlieue de Séville, en Espagne. Le Wedo forme ce que ce polyglotte (il parle cinq langues), grand amateur de cigares cubains et pianiste prodige, qualifie de « république indépendante ». â¨Une sorte de no man’s land artistique sans frontière, où les archets de musiciens israéliens et syriens côtoient les cuivres de Palestiniens ou d’Égyptiens et les percussions de Jordaniens. L’orchestre se produit dans les plus grandes salles d’Europe et des États-Unis. Mais, c’est dans le monde arabe que ses prestations sont les plus retentissantes, comme celles de Ramallah, en Cisjordanie, en 2005 et 2008.

Prix Nobel de la paix

Cependant, tout n’est pas aussi fluide qu’une symphonie. Derrière son message, cette formation s’est attirée les foudres de mouvances radicales. Pour les ultraorthodoxes israéliens, Barenboïm a trahi son pays. Pour les radicaux arabes, il pactise avec le diable. Le chef d’orchestre, son aura, sa personnalité, ne laissent pas indifférent. En 2005, il refuse d’accorder une interview à la radio de Tsahal. Des représentations sont annulées pour des raisons de sécurité. Quatre ans avant, Barenboïm a créé le scandale en terre israélienne après avoir joué Wagner, compositeur préféré de Hitler interdit dans l’État hébreu. Et les menaces se multiplient lorsque, début 2008, il prend la nationalité palestinienne au terme d’un autre concert à Ramallah.

À l’instar d’un Horowitz fuyant l’URSS ou d’un Rostropovitch jouant en novembre 1989 devant le mur de Berlin pour célébrer sa chute, Barenboïm est porteur d’un message plus moral que politique, même s’il milite inlassablement pour la création de deux États indépendants.

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La musique ne peut résoudre les conflits. En revanche, elle peut abolir des divergences considérées comme insurmontables. C’est ce que le Wedo réalise comme par miracle depuis une décennie. Une entreprise qui mériterait à elle seule que l’ancien mari de la violoncelliste Jacqueline du Pré se voie décerner le prix Nobel de la paix. Beaucoup militent actuellement pour cela.

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