Ali, faites-nous rêver !

Le peuple gabonais vient de porter son choix sur vous pour présider à sa destinée au cours de ce nouveau septennat. Recevez mes félicitations les plus chaleureuses, et à travers moi celles du peuple gabonais non votant. Le moment est venu pour que vous produisiez un programme de gouvernement, concret et solidement charpenté. Pour retrouver un vrai progrès, il vous faudra de l’imagination et du courage.

La panne de civilisation que nous connaissons tient beaucoup à l’abandon de certaines valeurs par le pouvoir, parfois avec la complicité de l’opposition. Or comment peut-on changer la vie des Gabonais sans être en mesure de les faire rêver ? L’égalité des chances est réduite, la justice sociale ne guide pas l’action publique, l’intérêt général a cédé devant les ambitions personnelles néopatrimoniales.

Il faut donner du sens aux projets collectifs. Une réponse globale doit être pensée pour la question de la précarité et du chômage, qui constituent des humiliations parmi

les plus brutales. Je vous conseille également d’inviter l’État à renouer avec les intellectuels et les chercheurs, ces « éclaireurs de la société ». La République est indissociable de l’Université. D’où votre devoir d’appeler à la mobilisation de l’intelligence collective pour une confrontation utile et non complaisante des élites avec vous.

Personnellement, je souhaite participer à la refondation de notre pays de deux manières : opposition et proposition. Oui, je serai un opposant et un proposant. En tant qu’intellectuel libre, républicain et démocrate, je combattrai vos idées régressives et je soutiendrai vos idées progressistes. C’est aussi une façon de vous aider à cimenter le socle de la « maison Gabon d’abord ». Le Gabon, dans sa diversité sociologique et idéologique, doit avoir de l’imagination pour susciter encore de l’espérance.

Patrice Moundounga Mouity, politologue, Bordeaux, France