Jusqu’ici, tout va bien

Malgré une légère baisse des ventes de romans et de manuels scolaires, la plupart des éditeurs se veulent confiants. Certains secteurs, comme la jeunesse et la bande dessinée, continuent même de progresser.

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Publié le 1 septembre 2009 Lecture : 4 minutes.

« La rentrée littéraire de septembre 2009 ? Elle est programmée depuis longtemps et le nombre de parutions est à peu près identique à celui de l’année dernière. Il n’y a pas de réduction du nombre de titres publiés », explique-t-on à la direction commerciale de la maison d’édition française Gallimard. Dans un marché qui n’obéit guère à des règles rationnelles et où les sommes en jeu sont rarement colossales, la crise économique ne semble, en apparence, pas bouleverser les habitudes. La plupart des éditeurs se veulent confiants.

D’ailleurs, si l’on s’en tient au principal indicateur traditionnellement mis en avant au mois de septembre – le nombre de romans publiés –, la baisse de la production est loin d’être drastique. Selon l’hebdomadaire professionnel Livres Hebdo, 659 romans seront mis en vente entre le 13 août et le 28 octobre 2009. Soit une baisse de 2,5 % par rapport à 2008 (17 titres en moins) et de 9,4 % par rapport à 2007. Ce sont surtout les romans français (430 en 2009, 463 en 2008, 493 en 2007) et les premiers romans (87, contre 91 et 102) qui pâtissent de ce resserrement.

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Si la décrue est plutôt légère, les éditeurs se méfient de l’avenir et optent pour la prudence. Alors que, en France, une rentrée littéraire ne s’imagine pas sans une bonne polémique, un auteur sulfureux ou une jolie moisson de textes érotico-chic, impossible d’identifier à ce jour quelle provocation émoustillera la presse et poussera les lecteurs vers les librairies. Vraisemblablement, les éditeurs ont renoncé à ces coups médiatiques parfois coûteux. L’échec monumental du tandem Michel Houellebecq-Bernard-Henri Lévy (Ennemis publics, Flammarion/Grasset) explique peut-être l’éphémère mise à l’écart du sensationnel. Règle de conduite : quand l’heure est à la morosité, ne pas prendre de risques inutiles.

Un fonds très spécialisé

Directeur des éditions Karthala, spécialisées dans les publications sur les pays du Sud, Robert Ageneau relativise la portée immédiate de la crise économique en ce qui concerne son activité. « Nous avons toujours connu la crise ! s’exclame-t-il. Mais comme nous avons un fonds très spécialisé, nous avons moins d’inquiétudes que nos confrères de la grande consommation. »

Il n’ignore pas pour autant la fébrilité du marché : « On sent une vraie tension au niveau des libraires, qui se retrouvent dans une situation très difficile. La production est trop importante, les retours sont plus rapides et les jeunes générations achètent moins de livres. Et ils doivent faire face à la vente via Internet. Le premier libraire de Karthala, c’est Amazon.fr ! » À l’en croire, la crise ne date pas d’hier et elle est quadruple : surproduction, baisse du pouvoir d’achat, diminution de la lecture sur papier et concurrence d’Internet compliquent la tâche des éditeurs et des libraires.

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En France, une étude rendue publique le 6 août par l’Insee confirme le recul du budget consacré aux livres. En 2006, les ménages ont dépensé 3,5 milliards d’euros pour acheter des livres, soit moins de 0,5 % de leur budget. Selon l’Insee, « le livre recule : d’abord pour toutes les générations (entre 1995 et 2001), puis pour les générations les plus jeunes ». Ce qui ne signifie pas que la lecture soit en baisse : chacun peut désormais lire sur son iPhone, son livre électronique, son ordinateur…

Dans l’ensemble, les indicateurs semblent annoncer une contraction du marché qui obligera les éditeurs à se montrer rigoureux quant aux tirages, aux prix de vente, aux mises en place et à la publicité. Les premiers à en souffrir pourraient être les auteurs qui vendent le moins et les collections peu rentables. Il est vraisemblable que les auteurs africains qui vendent le plus, comme Yasmina Khadra ou Alain Mabanckou, seront moins affectés que des auteurs qui ne bénéficient pas des mêmes couvertures médiatiques.

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Signaux positifs

Selon Livres Hebdo (n° 778, mai 2009), au premier trimestre 2009, seuls les secteurs de la jeunesse (+ 5 %), de la bande dessinée (+ 2 %) et des livres pratiques (+ 1 %) progressent. Les ventes de beaux livres chutent de 5 %, celles des romans de 3,5 %, celles des manuels scolaires de 4 % et celles des poches de 1,5 %. Pour autant, pas de quoi s’inquiéter outre mesure. À la Direction du livre et de la lecture, le chef de département de l’économie du livre, Geoffroy Pelletier, tempère : « Ce que l’on sait d’expérience, c’est que le marché du livre est assez stable du point de vue des prix et des ventes. Quand il y a une forte embellie de l’économie ou quand il y a une crise, le marché varie bien moins que dans d’autres secteurs culturels. Je n’ai pas de boule de cristal pour prédire l’avenir, mais je n’ai pas d’inquiétude forte. »

Certains signaux positifs peuvent même être soulignés. Ainsi, les exportations vers l’Afrique (bien moins importantes que celles en direction de la Belgique, de la Suisse ou du Canada) augmentent régulièrement depuis trois ans. De 7,4 % au Maroc, de 15,3 % en Algérie, de 50,8 % au Gabon, de 10,4 % en Tunisie et de 6,2 % au Cameroun. Certains marchés offrent donc de fortes opportunités. En clair : avis de coup de vent, mais pas de gros grain à l’horizon. 

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